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Liberté de la presse : Le journaliste Tabyam Ouédraogo écrit au Président du Faso

Ceci est une lettre ouverte du journaliste Tabyam Ouédraogo au Chef de l’Etat sur le rôle de la presse dans la période de transition qui s’ouvre au Burkina Faso. 

Vous avez prêté le serment de protéger la liberté de la presse et je vous en suis reconnaissant. Si vous permettez, voici exposé, pour moi, ce qu’il vous faut réussir pour les médias.

 Pour les autres aspects de la vie de la nation, j’ai déjà répondu comme nombre de citoyens à l’appel à contribution du comité dont le délai imparti pour le dépôt des travaux est fixé demain lundi. Dans l’attente de lire ce document que vous ne manquerez pas de transmettre aux médias, je vous prie de trouver ici l’expression de mon sentiment après le compte rendu fait  de votre rencontre avec les patrons de  médias.

Avec votre permission donc, je rappelle d’emblée le rôle de la presse en cette période et de tout temps. Il  est d’informer le public tout en permettant à diverses voix, autres que la vôtre, de se faire entendre. En cela la presse responsabilise le président du Faso que vous êtes ainsi que la Transition, l’appareil de gouvernance que vous vous apprêtez à mettre en mouvement d’ici peu. Aussi, monsieur le président, vous allez devoir accepter que les médias permettent aux gens de s’exprimer. Exprimer leur crainte. Dire leurs doutes et désaccords.

La presse va donc diffuser des opinions qui ne cadrent pas nécessairement avec les vôtres ni avec celles des membres et nombreux sympathisants du MPSR que j’ai vu manifester aujourd’hui alors que vous teniez une rencontre avec les patrons et les faîtières de la presse burkinabè.

Quand la presse va publier ces points de vue, et qu’elle va certainement prendre votre mouvement MPSR à partie dans ses éditoriaux et reportages, elle ne sera pas pour autant contre vous. Non rassurez-vous.  C’est juste qu’elle est dans son rôle. Celui de permettre et d’inviter à l’expression les multiples opinions qui ne manqueront pas de traverser la société burkinabè.

Le rôle essentiel des journalistes et des médias dans le combat que vous avez engagé depuis le 24 janvier 2022 sera d’avoir l’œil sur vos  activités. Les journalistes devront aider la population à connaître vos décisions, leur implication et intérêt mais également la complexité des procédés de leur mise en œuvre qui, je vous assure Monsieur le président, sont souvent compliqués pour les populations. Il s’agira, pour les journalistes d’expliquer aux populations comment les décisions prises à votre niveau et aux plus hauts échelons de la future Transition peuvent les affecter et impacter la vie de la Nation.

Je sais monsieur le président que les leaders en treillis même intègres comme vous l’êtes assurément et se disant attachés aux principes édictés dans notre Constitution complétée par l’Acte fondamental n’apprécient généralement pas que leurs politiques et actions soient critiquées en public. Mais, monsieur le président, il va falloir que vous souteniez le droit qu’a la presse de le faire. Et j’insiste vous devrez le faire et y veiller personnellement comme juré devant le Conseil constitutionnel (une pensée pieuse à son président qui nous a quitté ce jour). Cela pour éviter toute initiative contraire et tentative zélée d’autres personnes.

En vérité je vous dis ce que vous savez déjà. Une presse libre sert aussi à veiller au bon fonctionnement de l’État et de la société comme lorsqu’elle jette la lumière sur des faits de corruption que la justice peut saisir et élucider pour le bien de tous. Plus la presse sera indépendante de vous, du MPSR et de toute autre entité, mieux elle pourra avertir le public burkinabè et vous avertir également des manquements des responsables de la Transition. Mais également des torpilleurs du processus pour des desseins inavoués s’il y a lieu. Par exemple le non-respect la feuille de route de la Transition ou le fait de ne pas tenir les promesses faites de libérer en priorité les territoires occupés et restaurer l’intégrité.

Monsieur le président, la presse s’acquitte déjà d’un devoir important, celui d’informer le public. Elle n’a donc pas à vous « accompagner ». L’accompagnement bien compris n’avait guère besoin que vous le sollicitez. Internet, la télévision, la radio, et les journaux animés par des professionnels du traitement de l’information ne donnent que des informations variées, selon des lignes éditoriales.

Si vous avez une crainte, elle est ailleurs. Et je suis sûr que vous le savez mieux que moi. Réglez cette histoire de sentiment anti français ou pro russe pour commencer. Pas avec les termes du genre le Burkina est souverain, nous allons travailler avec tous les partenaires. Non. Dites clairement si oui ou non nous  allons devoir aller au front au lieu de marcher pour soutenir nos FDS qui y sont depuis.

 Tenez, s’il vous plaît un langage de vérité à la jeunesse sur les capacités réelles de défense et de sécurisation du territoire pour commencer. Et dites haut et fort et de façon claire où se situe l’intérêt de ce pays en termes de coopération avec des partenaires, et lesquels ?

Pour terminer, monsieur le président  je vous prie de bien veiller à :

– faire appliquer la convention collective par les patrons de presse;

– à réguler correctement les médias (réforme du CSC et des nominations de ses conseillers);

– ne pas payer tout ou partie de la redevance TNT des médias comme votre prédécesseur l’a fait;

– et à lancer un vaste programme d’éducation aux médias pour épargner ce pays de la nuisance des web activistes haineux et de la désinformation.

Que nos ancêtres nous guident et nous accompagnent !

Ouagadougou, le 20 février 2022

Tabyam Ouédraogo, journaliste

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