Le 17 octobre 2016, la Cour constitutionnelle de la RDC s’est prononcée en faveur du report de l’élection présidentielle. Une décision qui réjouit certainement les acteurs politiques de la majorité et la branche consentante de l’opposition politique qui a jusque-là pris part au processus de négociations piloté par le médiateur de l’Union africaine (UA), Edem Kodjo. Mais, tout se passe comme si les autorités congolaises avaient été surprises par ces élections et n’avaient pas mesuré l’étendue de la superficie de la RDC et sa démographie, au point de soutenir la nécessité du glissement du calendrier électoral. Les arguments peinent à tenir la route et il faut retenir contre elles, que l’accroissement de la population congolaise ne date pas d’hier. La CENI qui est l’instance technique chargée de l’organisation des élections et qui est une institution à la solde du prince régnant, a vite fait de se déclarer incapable d’organiser la présidentielle dans le délai constitutionnel. La Cour constitutionnelle dont les membres sont nommés par les autorités en place, s’est sentie comme un devoir de gratitude vis-à-vis du prince de Kinshasa qu’elle a contenté en tranchant le problème électoral en sa faveur. En aurait-il d’ailleurs pu être autrement dans une région où la dictature a pignon sur rue ? La RDC, après la tragédie suite à la marche contre le report de la date de l’élection présidentielle, court encore vers l’implosion dans les jours ou mois à venir, avec cette décision des grands juges.
Le report de date est acté par les grands juges
L’affrontement armé semble inévitable, au regard du rejet farouche du glissement du calendrier électoral par l’aile dure de l’opposition politique. Joseph Kabila, bien futé, a fait dans l’habileté managériale en associant quelques opposants politiques à la décision de report de la date de l’élection. Vital Kamerhé et ses amis qui ont pris part à ce dialogue compromettant, pourraient en payer le prix fort le moment venu. Pour l’instant, l’option principielle qui veut que le poste de Premier ministre revienne à l’opposition, contente bien les opposants qui ont acté le glissement du calendrier électoral. Mais derrière les avantages des portefeuilles, pourrait bien se cacher un gros piège qui ne sera mesuré à sa juste valeur que lorsque la situation va exploser. Kabila aura réussi à se faire des partisans pour ne pas faire face, seul, à la Cour pénale internationale (CPI) si d’aventure la détérioration de la situation commandait que ce gendarme de la justice internationale, entre dans la danse.
La Communauté internationale, l’Union africaine (UA) notamment, est responsable de ce qui est en cours en RDC. Car, l’UA, en commettant Edem Kodjo à la tâche de médiateur dans la crise congolaise, ne cherchait qu’à cautionner la forfaiture de Kabila. La Communauté internationale a accepté le glissement du calendrier électoral ne serait-ce que pour un court délai, mais les autorités congolaises se sont donné 18 mois supplémentaires pour organiser la présidentielle, en avril 2018. Un délai vraiment long. A la table des négociations, le rapport de force est favorable aux représentants du pouvoir en place, pendant que les opposants qui ont pris part aux négociations cèdent à l’appât d’entrée au gouvernement. Si fait que les négociations sont consacrées à autre chose qu’aux vrais problèmes de la RDC.
En tout cas, le report de date est acté par les grands juges. Il n’y a qu’à se préparer à gérer les conséquences à court et à long terme. On va donc vers une grave crise. Si déjà Kabila s’engageait solennellement à se retirer à l’issue des 18 mois de bonus que la Cour constitutionnelle vient de lui accorder, il pourrait apaiser d’une façon ou d’une autre, la situation actuelle. Ce qui limiterait, sinon éviterait le chaos qui se dessine à l’horizon.
Lonsani SANOGO