Après 32 ans de politique de la chaise vide, à la suite de l’admission de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) au sein de ce qui était à l’époque l’Organisation de l’unité Africaine (OUA), le roi Mohammed VI a officialisé, le dimanche 17 juillet dernier, à l’occasion du dernier sommet de l’Union africaine (UA), la volonté de son pays de réintégrer « sa place naturelle ». S’il faut se réjouir de cette décision qui, à n’en point douter, est un acte historique et responsable au regard du poids que représente le Maroc sur le continent, il n’en demeure pas moins qu’il y a des raisons de s’interroger sur les motivations réelles de ce come-back. En effet, nul n’ignore que les raisons avancées à l’époque par le Maroc pour se retirer de cette institution, étaient liées à l’admission en son sein de la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Alors, qu’est-ce qui peut justifier ce retour quand on sait que la RASD demeure toujours membre de l’UA ? Le Maroc a sans doute compris qu’en dépit des insuffisances et des nombreuses critiques formulées à l’endroit de l’UA, celle-ci reste une instance internationale qui compte. Et ce faisant, pourquoi ne pas la réintégrer quitte à travailler, en interne, à parvenir à ses fins? Sa stratégie semble claire : pour étouffer les revendications sahraouie, le royaume chérifien joue de son entregent diplomatique. Qu’à cela ne tienne, pour l’UA, le Maroc peut être une poule aux œufs d’or en raison notamment de son rayonnement économique sur le continent et de sa puissance militaire qui peuvent s’avérer très utiles aux missions de l’organisation. Ce retour annoncé du Maroc a pu être favorisé par plusieurs évènements : il y a la disparition du leader sahraoui, Mohamed Abdelaziz, ainsi que le revirement de plusieurs pays qui soutenaient la RASD.
La décision du Maroc cache mal des desseins inavoués
Les indépendantistes sahraouis ne peuvent plus compter aujourd’hui que sur deux parrains historiques de poids : l’Algérie et l’Afrique du Sud. Le Maroc est cité comme un exemple de pays tolérant en matière d’islam. Il se positionne comme un maillon essentiel dans la lutte contre l’extrémisme religieux. Cela peut s’avérer un important atout aux yeux de l’UA. Mais autant on peut se réjouir de ce retour annoncé, autant on peut craindre qu’il ne constitue un facteur bloquant dans la bonne marche de l’UA. De nombreuses voix s’élèvent en effet pour dénoncer ce soudain regain d’intérêt du Maroc pour les pays du continent. Pour les détracteurs du roi, cette décision du Maroc cache mal des desseins inavoués. Ils accusent le roi Mohammed VI de vouloir se servir de l’UA comme d’un instrument pour parvenir à ses fins : celui de régler ses comptes avec la République arabe sahraouie démocratique. Et ce, avec la complicité de certains de ses alliés chefs d’Etat. Le Sahara occidental sera-t-il sacrifié sur l’autel des intérêts marocains? Ce retour annoncé donnera-t-il raison à ceux qui soutiennent qu’un retour au sein de l’UA ne présage rien de bon, sinon qu’à fragiliser davantage l’UA qui est à la recherche d’un second souffle. L’avenir nous le dira.
Seydou TRAORE