L’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba, acquitté en appel de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, est encore sous la surveillance des autorités de la Cour pénale internationale (CPI).
« Monsieur Bemba a quitté le centre de détention hier (mardi) soir », a déclaré à l’Agence France Presse (AFP) Peter Haynes, avocat de Jean-Pierre Bemba, qui doit bientôt traverser la frontière pour rejoindre son épouse et ses cinq enfants installés en Belgique.
Selon une source proche du dossier, Jean-Pierre Bemba reste toutefois sous la surveillance de la Cour en attendant le feu vert des autorités belges à une demande de séjour.
Ancien riche homme d’affaires devenu chef de guerre puis vice-président, Jean-Pierre Bemba avait été condamné en première instance en 2016 à 18 ans de prison, la peine la plus lourde jamais imposée par la Cour pénale internationale (CPI), pour les meurtres, viols et pillages commis en Centrafrique par sa milice entre octobre 2002 et mars 2003.
Bemba a été acquitté en appel à la surprise générale vendredi. Son procès, ouvert à La Haye en novembre 2010, était le premier de la CPI mettant en avant la responsabilité d’un commandant militaire quant à la conduite des troupes sous son contrôle.
L’ancien chef de guerre a passé la dernière décennie dans le centre de détention de la CPI situé dans le quartier balnéaire haguenois.
La Belgique, pays de préférence de Bemba avant son retour en RDC
À Bruxelles, une demande de permis de séjour était étudiée mercredi par les services du secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, Theo Francken, a appris l’AFP de source proche du dossier.
« Une réunion est en cours », a dit de son côté un responsable du parti politique de Bemba établi à Bruxelles, soulignant tabler sur un feu vert des autorités belges d’ici à jeudi au plus tard.
« Le pays de préférence (pour Jean-Pierre Bemba), c’est la Belgique, c’est là qu’il souhaite séjourner en attendant de mettre sur pied son retour en République démocratique du Congo (RDC) » , a ajouté ce responsable, Jean-Jacques Mbungani.
Selon des sources concordantes, l’épouse et les enfants de Bemba vivent dans une villa de Rhode-Saint-Genèse, commune verdoyante cossue située à 15 km au sud de Bruxelles. C’est dans cette localité que l’ancien chef de guerre congolais avait été arrêté le 24 mai 2008 à la demande de la CPI.
Mardi en fin de journée, après que la Cour internationale eut ordonné sa libération provisoire, son avocat Peter Haynes avait indiqué qu’ « une série d’arrangements diplomatiques était nécessaire pour le transfert » vers l’étranger. Les autorités néerlandaises ont émis le souhait que le Congolais ne soit pas « lâché dans la nature » aux Pays-Bas, avait-il précisé.
Un million d’euros pour les victimes
Le fonds au profit des victimes de la CPI a par ailleurs décidé d’accélérer le lancement d’un programme d’assistance d’un million d’euros, sous forme de réhabilitation physique et psychologique et de soutien matériel, pour les victimes centrafricaines des miliciens de Jean-Pierre Bemba.
« Vous n’êtes pas oubliées. Les préjudices que vous avez subis sont reconnus et appellent de toute urgence une réponse significative », a indiqué le Fonds dans un communiqué.
La procureure de la Cour, Fatou Bensouda, a salué mercredi cette décision du Fonds et exprimé « sa solidarité envers les victimes en République centrafricaine depuis plus de dix ans » ainsi que sa « déception à l’égard de cette décision et des conséquences qu’elle aura, avant tout, pour les victimes ».
Une possible candidature à la présidentielle
La décision surprise de la CPI intervient à un mois et demi du dépôt des candidatures à l’élection présidentielle congolaise prévue le 23 décembre pour remplacer le président Joseph Kabila, arrivé au terme de son deuxième et dernier mandat en décembre 2016.
Adversaire de Kabila à l’élection présidentielle de 2006, Jean-Pierre Bemba va de l’avis général rejouer un rôle sur la scène politique congolaise, au moment où l’opposition affirme se chercher un candidat unique.
Selon Mbungani, Bemba ne compte pas s’exprimer publiquement avant le 4 juillet, date à laquelle est attendue la sentence définitive dans une affaire annexe de subornation de témoin lui ayant valu une condamnation en première instance à un an de prison et 300 000 euros d’amende en mars 2017.
Jeune Afrique