ActuBurkina
A la une Politique

Procès Thomas Sankara : les avocats de la défense doutent de la véracité des témoignages

Le procès Thomas Sankara, après près d’un mois de suspension à la demande de certains avocats des accusés pour inconstitutionnalité suite aux derniers évènements sociaux politiques, a repris ce 22 mars 2022 après la décision du Conseil constitutionnel.  Une reprise qui a débuté avec les plaidoiries des avocats de la défense. 

En effet, Me Issiaka Ouattara a entamé les plaidoiries pour la défense de son client, Jean Christophe Aliou Djébré, ce, après les exposés introductifs de Me Mathieu Somé et Me Abdoul Latif Dabo. Dans son exposé, l’avocat a souligné au Tribunal que son client doit être poursuivi pour « délit et non pour crime » conformément à l’article 160 du Code pénal de 1984. Il a soutenu que l’accusé Alidou Jean Christophe Djébré, a établi l’acte de décès de Thomas Sankara, en âme et conscience et non sur une quelconque contrainte et sur demande de la veuve Sankara. « Il était animé d’un sentiment de rendre service. Il n’avait pas l’intention de commettre un délit. L’intention coupable dans ce sens n’est pas constituée », a-t-il appuyé. A défaut, soutient-il, « l’accusé Alidou Jean Christophe Djébré doit être relaxé pour infraction non constituée ». Pour rappel, Alidou Jean Christophe Djébré est poursuivi pour faux en écriture publique pour avoir mentionné sur l’acte de décès de Thomas Sankara, « mort naturelle ». Lors de son audition, il a plaidé non coupable et le parquet dans ses réquisitions, a plaidé pour qu’il soit relaxé.

Me Aliou Diakité et Me Moumouny Kopio, avocats de l’accusé Amadou Kafando, ont plaidé que leur client, poursuivi pour faux en écriture de publique, bénéficie d’une « réparation ».  Ils ont mentionné que le fait que leur client ait mentionné « mort accidentelle » sur l’acte de décès de Bonaventure Compaoré, n’est rien d’autre que ce que l’information fournie par les autorités d’alors. Pour les avocats, Blaise Compaoré avait servi au monde entier la thèse de la fusillade comme « un incident malheureux qui a occasionné la mort de Thomas Sankara et de ses 12 compagnons, le 15 octobre 1987 ». Par conséquent, insiste Me Aliou Diakité, son client n’avait pas d’autre choix que de le mentionner sur l’acte de décès de Bonaventure Compaoré. Il soutient que son client a posé l’acte à la demande et sur insistance de la veuve du regretté. Donc pour lui, « l’infraction est non constituée car l’élément matériel est constitué mais l’élément moral fait défaut ».

Pour lui, juger son client coupable sur cet acte, serait lui faire un mauvais procès. Il plaide en effet que « réparation » soit faite à son client et ses étudiants car il est un enseignant, et depuis l’ouverture du procès, il n’a plus retrouvé les amphithéâtres. Il plaide également pour une réparation morale à sa faveur car durant 30 ans, des gens l’ont indexé d’avoir tué Thomas Sankara sans même comprendre qu’il est poursuivi pour faux en écriture publique. Pour rappel, le parquet militaire a requis que, Amadou Kafando soit relaxé pour infraction non constituée lors de ses réquisitions.

Et Me Olivier Somé, avocat de l’accusé Démé Djakalia de plaider également pour la non constitution d’éléments matériels d’infraction, de complicité d’attentat à la sureté de l’Etat contre son client. Par conséquent, pour qu’un acte matériel de complicité puisse être établi, il doit avoir la même intention coupable que celui de l’auteur de l’acte à savoir, aider ou assister les acteurs principaux. Pour lui, la loi pénale est d’interprétation stricte et de simples témoignages ne sauraient tenir lieu de vérité. Son client n’ayant pas posé un acte matériel de complicité, il plaide qu’on l’acquitte au profit du doute.

Me Kopio, l’un des avocats de l’accusé Jean Pierre Ardjouma Mory Palm a rejoint son prédécesseur, Me Victoria Nébié, avocate de l’accusé Tibo Ouédraogo qui doute de la vérité qui résultera de ce procès. « Je doute que ce procès soit celui de Thomas Sankara et ses 12 compagnons. Je suis dans une sorte de parodie. On veut assassiner le droit au pour faire une justice pour Thomas Sankara et les familles des ayants-droits », s’indigne Me Moumouny Kopio. Pour lui, le Colonel Jean Pierre Palm était un officier de gendarmerie reconnu pour sa loyauté. A l’en croire, le simple fait qu’il soit un ami du Capitaine Blaise Compaoré ne fait pas de lui une marionnette. Selon lui, son client avait des qualités reconnues de tous et au regard de ses qualités, tous les régimes qui se sont succédés ont toujours travaillé avec lui. Il bat en brèche l’infraction d’attentat à la sureté de l’Etat. « Finalement, je me demande si c’est la carrière de M. Palm qu’on juge ou on le juge pour attentat à la sureté de l’Etat ? », s’interroge Me Kopio. Pour lui, ce procès est un acharnement contre son client et « c’est encore les millions de F CFA des contribuables qui ont été claqués. Et je suis en colère, une colère que j’ai envie de déverser sur vous M. président de la chambre si j’avais les moyens », regrette-t-il. Pour lui, il n’y a pas d’éléments matériels constitutifs d’infraction. « M. le président de la chambre, c’est vous qu’on essaie de piéger, heureusement que le droit vous donne une voie de sortie : le doute qui profite à l’accusé », a-t-il plaidé.

Il faut noter qu’au-delà des accusés Jean Pierre Palm, Démé Djakalia, Amadou Kafando et Guébré Alidou Christophe, Me Mamadou Coulibaly, avocat de l’accusé Albert Belemlilga et Me Victoria Nébié, avocate de l’accusé Tibo Ouédraogo ont, quant à eux, fondé leur argumentaire autour de la prescription, du doute des témoignages pour demander l’acquittement pur et simple de leurs clients.

Le procès se poursuit le 23 mars 2022 au Tribunal militaire de Ouagadougou avec la suite des plaidoiries des avocats de l’accusé Jean Pierre Palm.

Didèdoua Franck ZINGUE

Articles similaires

CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE: la FAIB appelle les porteurs de sa révision à une démarche plus participative

ActuBurkina

Burkina: Le couvre-feu levé pour compter de ce 1er octobre 2022 (Communiqué)

ActuBurkina

Protection des mineurs contre les contenus audiovisuels à caractère homosexuel : le CSC échange avec les éditeurs et les distributeurs télévisuels sur la nouvelle décision

ActuBurkina

Laisser un Commentaire

ACTUBURKINA

GRATUIT
VOIR