L’audition des témoins s’est poursuivie ce 30 novembre 2021 au Tribunal militaire de Ouagadougou avec Mousbila Sankara, ex ambassadeur du Burkina à Tripoli en Libye.
A son deuxième jour d’interrogatoire, le témoin Mousbila Sankara devait répondre aux questions du Parquet, des avocats de la partie civile mais aussi de ceux de la défense.
Sur la question de savoir ce qu’il sait de l’assassinat de Thomas Sankara et de ses 12 compagnons, Mousbila Sankara a rappelé qu’il n’était pas au pays au moment des faits. Il dit être rentré au pays, le 27 novembre 1987. Et par la suite, il a été arrêté par la gendarmerie nationale. Il a confié avoir été torturé. A la barre, Mousbila Sankara a dit ce qu’il a appris et ce qu’il sait de la mort de Thomas Sankara.
Pour ce témoin, Blaise Compaoré n’était pas le principal commanditaire du coup d’Etat qui a coûté la vie à Thomas Sankara. « Blaise a été pris dans un élan qui l’a dépassé et il a assumé », a t-il affirmé . Il pense que « Blaise a fabriqué des monstres à savoir Gilbert Diendéré et Hyacinthe Kafando, qui l’ont bouffé »
Selon ses explications, les relations de Hyacinthe Kafando et de Gilbert Diendéré n’étaient pas au beau fixe. Ils ne s’appréciaient pas positivement l’un l’autre. Chacun voulait à tout prix prouver sa fidélité à Blaise Compaoré. Et c’est ce qui les a conduit à des exécutions sommaires. Alors qu’au début, poursuit Mousbila Sankara, les deux étaient tous sous la coupe de Blaise. Compte tenu du climat qui prévalait en son temps, chacun voulait saisir l’occasion pour se faire valoir. « Alors que hiérarchiquement parlant, il y avait Blaise Compaoré ensuite Gilbert Diendéré et enfin Hyacinthe Kafando », explique le témoin.
Revenant sur les circonstances de l’assassinat de Thomas Sankara, Mousbila Sankara a fait savoir que pour Hyacinthe Kafando, c’était une chose facile à régler. « Il suffisait de coller une balle à Sankara et s’en était fini. Et c’est ce qui a été fait», a t-il martèlé. “Et c’est à partir de cet instant que Hyacinthe Kafando avait acquis un certain rang”, a précisé Mousbila Sankara. Toujours d’après lui, la seule personne en mesure d’arrêter Hyacinthe à l’époque, c’était Gilbert Diendéré. Mais son manque de réactivité lui rend coupable. Ce qui m’amène à tirer la conclusion selon laquelle, «Gilbert Diendéré n’a pas commandité le coup d’Etat, mais il l’a execute ».
Cependant, Mousbila Sankara a fait noter qu’à un certain moment, Gilbert Diendéré est monté en puissance et que Blaise et Hyacinthe avaient peur de lui. Raison pour laquelle explique-t-il, « Hyacinthe Kafando a dû quitter le pays à un moment donné ». Pour étayer sa thèse, il pose la question au juge : Vous ne trouvez pas bizarre que tous les témoins clés de cette affaire aient disparu ? Non! Vous, vous en savez ? Rétorque le juge.
« Pour moi, c’est parce que jusqu’à présent Gilbert Diendéré inspire la peur de ce qu’il est capable de faire», lâche-t-il et de poursuivre en ces termes : « c’est lui qui a tué tous les autres à savoir Henri Zongo, Lingani et les autres ». Et le témoin d’interroger le juger en ces termes : « quand je vous parle de peur, vous savez pourquoi en voulant constituer votre juridiction vous avez eu du mal à trouver quelqu’un à savoir les assesseurs militaires ? » « Vous savez également pourquoi des juges ne s’étaient pas encore saisis de l’affaire Sankara depuis 1987 jusqu’à la transition avec Isaac Zida et M’Ba Michel (Michel Kafando) », a-t-il interrogé pour finir sans rien dire de plus.
L’audience se poursuit avec la comparution d’un autre témoin à savoir Fidèle Toé, un ex ministre sous le CNR.
Didèdoua Franck ZINGUE
