Le vendredi 7 janvier dernier devant la Représentation nationale, le nouveau Premier ministre, Lassina s’est prêté à l’exercice constitutionnel de déclaration de Politique Générale (DPG). A l’issue de cet exercice, le PM a reçu le quitus de 103 députés sur les 127 pour implémenter sa politique gouvernementale. Nous avons recueillis ici pour vous, les diverses appréciations de quelques observateurs et acteurs de la scène politique burkinabè. Lisez plutôt!
Sagado NACANABO, Secrétaire exécutif du REN-LAC
« Le Premier ministre se trompe de priorité”
« Le passage du premier ministre devant la Représentation nationale fait partie du dispositif institutionnel. Il est donc dans son rôle et je n’en fais pas une fixation. Ce que je crains fort en écoutant ce discours, est que le Premier ministre se trompe de combat ou de priorité par rapport au vécu et attentes des populations. Il parle beaucoup au moment où la parole doit céder la priorité à l’action pour des résultats concrets vainement attendus. L’heure n’est vraiment pas à l’appréciation des discours. Et j’espère que le Premier ministre le comprend bien et qu’il est conscient que les Burkinabè ne vont pas se satisfaire de promesses, d’énoncés d’intentions ou d’engagements, même si ceux-ci portent sur le financement de l’ASCE-LC et la Justice pour le succès de l’Opération « mains propres » annoncée par le président du Faso. Aujourd’hui, il faudrait plus que des mots pour nous convaincre que le gouvernement est en train de changer de cap et qu’il a réellement inscrit au cœur de son action, la lutte contre la corruption et le devoir d’exemplarité comme l’ASCE-LC et le REN-LAC l’ont fortement demandé à la tribune d’interpellation des trois pouvoirs le 18 novembre 2021. Devant l’ampleur des drames que continuent de vivre quotidiennement les citoyens, ce n’est pas avec des phrases, aussi belles soient-elles, que l’espoir renaîtra »
Labidi NABA, président de Observateurs sans frontiers
“Le problème c’est comment joindre l’acte à la parole”
« Dans la forme le Dr Lassina Zerbo nommé le 10 décembre 2021 est dans les délais de sa prestation à l’hémicycle, aussi il a su accomplir l’exercice avec enthousiasme et a répondu sans ambages à toutes les questions des députés. Au fond, le Premier ministre a rassuré par un discours adapté, un discours réaliste et ses réponses aux questions étaient persuasives. Attendu vivement sur la situation sécuritaire, il a su proposer des mesures à la fois stratégique et opérationnelle de reconquête des zones perdues et du retour des PDI dans leurs localités d’origines. Il entend transformer l’Administration publique pour la rendre plus adaptée et débarrassée du laxisme, du favoritisme et de la corruption, toute chose capitale au déploiement de toute politique publique dans un pays. La réconciliation nationale, la lutte contre la pandémie du coronavirus, l’économie, la culture, la diplomatie ont été abordées avec réalisme et pertinence. Si fait que les députés l’ont plébiscité à 103 pour et 24 abstentions. En somme le premier ministre a réussi son passage devant l’Assemblée nationale mais là n’est pas la difficulté. Le problème c’est comment joindre l’acte à la parole et sur ce point notre contribution à tous est attendue parce que nous n’avons qu’une seule patrie à sauver le Burkina Faso »
Arounan GUIGMA, Journaliste-Communicateur
» Un PM imprégné de l’urgence du moment »
« La DPG n’est pas un secret de polichinelle. Elle est plutôt de coutume qu’un premier ministre nouvellement nommé livre devant la Représentation nationale son programme de politique générale afin de convaincre les députés et les populations Burkinabè sur la vision de sa gouvernance, qu’il attend implémenter pour la gestion du pays. Pour le cas du Premier ministre, Lassina Zerbo, il est un technocrate, adulé pour son parcours professionnel encensé de toute part.
Imprégné de l’urgence du moment, le premier ministre Zerbo a bâti son grand oral autour de quatre axes majeurs pour un Burkina sécurisé, prospère et réconcilié avec lui-même.
-Le retour de la paix, de la sécurité et la consolidation de la résilience.
- le retour des personnes déplacées internes dans leur localités d’origines.
- La réconciliation nationale et
- La lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite.
Pour le premier ministre, la détérioration progressive de la situation sécuritaire et les différents problèmes qui minent la société burkinabè, ne peuvent êtres jugulés que dans la prise en compte de ces quatre principes de gouvernance qui vont constituer sa feuille de route. Et il entend les appliquer dans l’urgence de la situation avec son équipe gouvernementale de combat. L’on peut affirmer que le nouveau Premier ministre a convaincu l’ensemble des composantes de la nation Burkinabè par sa déclaration de Politique générale devant les élus nationaux. Du reste, cette assurance des Burkinabè devra se traduire rapidement dans la mise en application effective et progressive des mesures énoncées. Que ce programme déroulé, qui a eu l’assentiment de 103 députés, soit respecté scrupuleusement conformément à la détermination et au dévouement que comptent incarner ce gouvernement resserré et qui sera rompu au combat »
Al Hassan SINARE, député du MBF
“Faire renaître le phénix burkinabè de ses cendres”
“La DPG du Premier ministre a été cohérente et présentée avec méthode et rigueur. En s’appuyant sur la volonté du président du Faso de changer de paradigmes, il a décliné sa politique en quatre grands piliers pour booster l’action gouvernementale. Ces piliers prennent globalement en compte les préoccupations majeures des populations. Nous attendons la concrétisation de ces vœux qui doivent aller au-delà des intentions de bonne foi. C’est pourquoi nous avons insisté sur la gouvernance vertueuse qui est devenue un oiseau rare, alors que cela devrait être la boussole, l’essence même de notre qualité de Burkinabè à savoir la dignité et l’intégrité. Nous sommes convaincus que la lutte contre la corruption dans tous les domaines pourra sans nul doute faire renaître le phénix burkinabè de ses cendres. Du reste, la détermination affichée du Premier ministre à mettre en ordre de bataille son équipe en se fondant sur la discipline et la probité dans leurs missions de service public au sommet de l’Etat serait un catalyseur d’espoir pour notre peuple. Nous pourrions faire des avancées significatives si tous les fils et filles du pays se mettent ensemble pour tirer dans la même direction contre l’ennemi commun et taire momentanément les divergences et querelles politiciennes. Enfin, on peut relever que cette déclaration a fait l’objet d’un minimum de consensus, en ce sens que l’Opposition politique s’est abstenue au lieu de voter contre. Nous souhaitons au PM plein succès dans ses prérogatives »
Issiaka OUEDRAOGO, président du CISAG
“Tous les problèmes au Burkina relèvent de l’urgence”
« Le premier ministre Lassina Zerbo a été éloquent, offensif, avec beaucoup d’énergie. J’ai vu en l’homme quelqu’un qui est prêt à aller au front, et qui est pressé de trouver la solution tant attendue dans la lutte contre le terrorisme et celle de la mal gouvernance qui mine le Burkina. Tout les problèmes au Burkina relèvent de l’urgence et tout doit avancer ensemble. C’est ce qui rendra encore plus ardue la tâche du Premier ministre Zerbo sur le terrain. Le pays a besoin de réformes en profondeur, avec en toile de fond, une volonté politique, notamment dans la lutte contre la corruption. Le rétablissement de l’autorité de l’Etat et le retour des PDI dans leurs localités sont des préalables. Je souhaite bonne chance au Premier ministre Zerbo dans l’exercice de cette noble et difficile mission que le chef de l’Etat lui a confiée”
Almamy KJ SG du SYNAMUB
« Ce n’est pas une question de remplacement de personnes »
“Il convient avant tout propos de rappeler le contexte qui a prévalu à la nomination de ce nouveau Premier ministre. En effet comme vous le savez c’est suite au massacre d’Inata qui a causé la mort de plus de 50 gendarmes. Nous nous rappelons des conditions inacceptables et déplorables de travail de nos FDS. Ce Premier ministre semble disposer d’une forte expérience dans la diplomatie international. Cependant il faut être réaliste. Sa lettre de mission répond à la mise en œuvre de la politique sociale du président qui l’a nommé. Et de ce point de vue, nous ne nous faisons aucune illusion. Car depuis l’avènement du pouvoir MPP et alliés, malgré les changements de Premiers ministres et bien d’autres responsables, on n’a observé aucune amélioration dans les conditions de des Burkinabè.
Nous n’aurons cesse de le dire, ce n’est pas une question de remplacement de personnes. C’est un problème de système de gouvernance politique. Vous n’êtes pas sans être informés de la gouvernance chaotique et la corruption que nous dénonçons au quotidien. C’est la preuve de l’échec notoire du régime à répondre aux préoccupations des populations. Ce n’est donc pas un nouveau Premier ministre qui viendra rompre ces mauvaises pratiques. Aujourd’hui les mauvaises politiques sociales du régime ont plongé les populations dans une misère sans précédent. L’ accès à l’éducation, à la santé, au logement est devenu un véritable calvaire.
Les attentes et les préoccupations des populations sont clairs. Que cessent l’impunité, les crimes économiques et de sang, la gabegie et les détournements. Il est claire que le régime actuel ne puisse répondre à ces préoccupations. Nous estimons que le peuple a intérêt à s’organiser non seulement pour faire face à l’hydre terroriste mais également à cette bande de politiciens auteurs de son malheur. Il est donc impératif d’aller à une unité populaire et d’œuvrer à l’avènement d’un changement radical et profond, à savoir une révolution populaire et démocratique, seule alternative politique pour notre peuple”
Propos recueillis par Kiswendsida Fidèle KONSIAMBO
