L’ancien vice-président du Zimbabwe a officiellement été investi président, vendredi à Harare, afin d’assurer la transition après 37 ans de règne de Robert Mugabe. Il hérite d’un pays ruiné et avide de réformes.
Après 37 ans sous la coupe de l’autoritaire Robert Mugabe, le Zimbabwe a mis vendredi 24 novembre un point final à son règne avec l’investiture de son successeur, Emmerson Mnangagwa.
L’ancien vice-président de 75 ans avait été désigné pour devenir le nouveau chef de l’État par le parti au pouvoir, la Zanu-PF. Il prend les rênes d’un pays ruiné, trois jours après la démission historique du plus vieux dirigeant en exercice de la planète, 93 ans, poussé vers la sortie par son armée, son parti et la rue.
« Moi, Emmerson Dambudzo Mnangagwa, jure qu’en tant que président de la République du Zimbabwe je serai loyal à la République du Zimbabwe et obéirai, soutiendrai et défendrai la Constitution et les lois du Zimbabwe, » a-t-il prêté serment devant plusieurs dizaines de milliers de personnes dans le plus grand stade de la capitale, Harare, le National Sports Stadium.
Robert Mugabe était absent de la cérémonie, selon l’envoyée spéciale de France 24 à Harare, Caroline Dumay. Précisant qu’il ne sera pas inquiété et bénéficiera d’une « retraite confortable », elle ajoute néanmoins que le sort de l’ancienne Première dame, Grace Mugabe, est toujours incertain.
L’Afrique du Sud et la Grande-Bretagne absents
En 1980, c’est un autre stade de la capitale qui avait accueilli la cérémonie d’indépendance du Zimbabwe, en présence bien sûr de Robert Mugabe, mais aussi du chanteur Bob Marley, du Prince Charles et d’une dizaine de chefs d’État.
Cette fois, aucun membre de la famille royale britannique n’a fait le déplacement. L’ancienne puissance coloniale sera représentée par son secrétaire d’État chargé du Développement, Rory Stewart. Même le président sud-africain, Jacob Zuma, a décliné l’invitation du pays voisin, au motif qu’il reçoit au même moment son homologue angolais Joao Lourenco. À la place, il a dépêché son ministre des Communications, mais a félicité le nouveau président, déclarant qu’il « espère que [Mnangagwa] guidera le Zimbabwe vers une période de transition », selon Reuters.
Le président du Botswana, Seretse Ian Khama, celui du Mozambique, Filipe Nyusi, et le vice-président namibien Nickey Iyambo étaient en revanche présents lors de l’investiture.
Espoir de jours meilleurs
Les Zimbabwéens, épuisés par un chômage de masse, une crise des liquidités et la répression de toute contestation, ont acclamé l’annonce de la démission de Robert Mugabe et espèrent des jours meilleurs. Dans son premier discours depuis le début de la crise, Emmerson Mnangagwa a promis de s’atteler rapidement à la tâche. « Nous voulons relancer notre économie, nous voulons des emplois », a-t-il lancé devant ses partisans, sans détailler son programme.
Son profil tempère toutefois les enthousiasmes. Emmerson Mnangagwa, 75 ans, un fidèle parmi les fidèles du régime, a longtemps exécuté sans sourciller la politique répressive de l’ancien président. « Des dizaines de milliers de personnes ont été torturées, ont disparu ou ont été tuées » sous l’ère Mugabe, selon Amnesty International.
Soucieux de rassurer, celui que les Zimbabwéens surnomment « le crocodile » a pour l’instant montré un visage souriant, promettant d’être le « serviteur du peuple ».
Dans l’opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) a affiché sa préférence pour la mise en place d’un gouvernement d’union nationale jusqu’aux élections prévues en 2018, mais a assuré qu’aucune discussion n’était engagée. Son chef, Morgan Tsvangirai, s’est montré jeudi, dans un entretien avec l’AFP, très magnanime envers le président Mugabe, assurant que les Zimbabwéens ressentaient « des émotions conflictuelles pour ce héros, qui est aussi une brute ».
France24 avec AFP