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SMOCKEY, artiste-musicien, membre fondateur du Balai citoyen :   « Nos hommes politiques sont prêts à conquérir le pouvoir mais pas à l’assumer »

 Ils sont certainement  nombreux ces Burkinabè qui se demandent pourquoi l’homme,  en plus d’avoir disparu des écrans radars, ne donne plus de la voix même sur certains sujets pour lesquels ils voudraient bien l’entendre.  Membre fondateur du mouvement le Balai citoyen, il a été  très souvent critiqué d’être plus un activiste quun artiste. Mais même tapi dans l’ombre, l’homme travaille.  C’est en tout cas ce qui ressort de cette interview réalisée par Actuburkina.net, le 17 août 2020, dans son studio à Wemtenga, à  Ouagadougou. C’est sans langue de bois que Smockey, à l’état civil Serge Bambara,  puisque c’est bien de lui qu’il s’agit, a répondu à certains  sujets de l’actualité nationale,  notamment le débat sur la modification du code électoral, l’interdiction des campagnes déguisées, les élections de novembre 2020, l’engagement politique de l’autre membre fondateur du Balai citoyen, Guy Hervé Kam avec son mouvement SENS. Il a également levé un coin du voile sur ses projets.  

 

Actuburkina.net : Que devient Smockey que l’on voit désormais rarement sur le terrain ?

 Je suis là, je continue mes activités artistiques et Dieu seul sait qu’elles sont nombreuses. Je n’ai pas cessé d’être un acteur de la société civile, contrairement à ce que pourraient penser certains. Le terrain commande la manœuvre.  Vous devez                 admettre que le terrain n’est plus comme au temps de l’insurrection populaire, si c’est de ce terrain dont vous faites allusion. Au plan  artistique,  je suis sur plusieurs projets en même temps.

 Quels sont donc ces projets ?

 On me reproche d’être plus un activiste qu’un artiste, mais je réponds en disant que les deux ne s’opposent pas. Il y a de nombreux artistes qui exercent les deux, parce qu’il y a vraiment un intérêt à tenir le fond dans la forme. C’est dire que vous ne pouvez pas passer votre temps à critiquer la mal gouvernance,  à décrier la pauvreté endémique, les questions de santé, etc., et ne pas s’atteler sur le terrain pour faire en sorte que les choses changent. Il faut joindre l’acte à la parole. Ce qui fait que je n’ai jamais cessé d’être artiste. Je prépare deux projets dans l’immédiat. Le projet le plus gros sur lequel je travaille depuis un peu plus de deux ans, c’est une pièce musicale qui s’appelle le « Syndrome de la pintade » qui va regrouper non seulement des musiciens, parce que c’est un spectacle live,  mais également  des gens du théâtre. Donc,  il y a une mise en scène avec des costumes,  des humoristes. Je travaille sur le projet avec Philomène Nanema, Bamogo de Gombo. com. C’est une pièce musicale qui sera drôle mais avec un contenu politique, notamment les questions de  démocratie. La démocratie, comme le dit  tout le monde, est-elle véritablement au service des peuples ? Est-ce le peuple qui ne s’engage pas ou est-ce les politiciens qui trahissent la cause des peuples ?  Bref, on va parler de  beaucoup d’actualités qu’on fera sous forme de  chansons et de rires,  et cela  va aboutir d’ailleurs à l’enregistrement du prochain album. Je réfléchis à un livre aussi qui va sortir par la suite. Concernant les élections,  je travaille sur une chanson qui va interpeller mes amis habituels,  les politiques,  et qui s’appellera « Pourriture noble ». Cette chanson portera  sur des questions de corruption en campagne, de clientélisme, puisque c’est un cercle vicieux. C’est-à-dire que vous avez une même personne qui a,  d’une certaine façon,  monopolisé le pouvoir,  le pouvoir de l’argent. Nous citoyens,  sommes aussi responsables dès lors que nous acceptons ces miettes que les politiciens nous distribuent. Nous jouons leurs jeux, nous permettons à un vieux système de rester un bloc solide pendant que,  malheureusement,  des vocations jeunes ne peuvent plus s’installer tout simplement parce que la corruption a gangréné tout le processus. Ce sera donc une chanson qui se voudra drôle, un peu dans le style de « Votez pour moi », comme j’ai l’habitude de réagir pendant les élections.

 En plus de vous, une figure du Balai citoyen, en l’occurrence Sams’K le Djah, reste étonnement discret. Comment expliquez-vous cela ?

 Nous sommes permanemment en contact, il va bien. Il s’occupe de sa petite famille puisqu’il réside en ce moment aux Etats-Unis. La distance peut-être, peut expliquer son manque de présence sur la scène locale. Il n’en demeure pas moins vrai qu’il reste un compatriote qui, à chaque occasion,  ne manque pas de dire ce qu’il pense en ce qui concerne  l’actualité de son pays.

Comment se porte  votre mouvement le Balai citoyen ?

 Il se porte bien, il continue sa mission de veille citoyenne et de formulation de propositions, parce que c’est sa vocation. Il vient de renouveler ses instances pour continuer sa mission de conscientisation.

 

Après avoir lutté  contre le projet de modification de l’article 37,  qui a abouti au départ de Blaise Compaoré du pouvoir, quel est aujourd’hui l’agenda du Balai citoyen ?

 Je disais tantôt qu’il faut refonder la façon dont fonctionne le Balai citoyen puisque le terrain n’est plus exactement le même, en plus de renforcer son noyau, ses bases un peu partout sur le territoire comme  à l’extérieur, ce qui demande  beaucoup de travail. Nous avons mis en place un plan stratégique qui commande des actions qui vont se dérouler. Si la parole est une arme, le silence s’apparente à un bouclier qui cache aussi des activités qui ne sont pas moins importantes que celles que nous avions eu à mener sur le macadam. Parce que c’est ça le problème, les gens veulent nous voir sur le macadam, notamment sur les principales artères de Ouagadougou, alors qu’il y a d’autres moyens de combattre  et de se réadapter en fonction de cette gouvernance qui, qu’on le veuille ou pas, est légitime, car  issue des urnes et qui est limitée à deux mandats. Quel est le problème ?  Est-ce que ce sont les citoyens qui ont abandonné leurs prérogatives ou est-ce que ce sont les intellectuels qui ont trahi leurs missions ? Allez donc savoir. Mais je pense qu’il y a un peu des deux. Nous,  dans ce cas-là, nous  essayons  de parler moins et de plus agir, et c’est pour cela qu’on est sur plusieurs projets.  Nous sommes par exemple sur un projet portant sur la  question de sécurité dans toute la région de l’Est, en concertation avec d’autres Organisations de la société civile (OSC), dont l’objectif est de sensibiliser, de former et d’interpeller sur la question malheureuse du terrorisme. Nous sommes aussi sur la question des coupures  incessantes d’eau à Ouahigouya, la question des expropriations des citoyens de leurs terres, par exemple,  dans la commune de Bama. La  question des lotissements à Ouagadougou. Nous travaillons aussi sur un projet de suivi des politiques publiques avec les populations. Nous venons d’obtenir un appui du Fonds des Nations unies pour la démocratie, pour travailler sur la question de l’implication des jeunes dans le processus électoral. Nous avons également travaillé avec la CENI comme nous l’avons fait lors des élections passées, avec pour objectif de  pousser les jeunes à s’inscrire un peu plus sur les listes électorales, mais aussi suivre le vote lui-même , parce qu’à l’époque,  nous avions fait deux campagnes : « après ta révolte, ton vote », et « je vote et je reste ». Nous sommes en train de vouloir reproduire la même chose. Nous sommes aussi co-fondateurs d’un réseau mondial qui s’appelle global partner network et ce réseau veut pointer du doigt  la question de coopération Nord-Sud, très souvent teintée de colonialisme et de néocolonialisme. Du coup,  il s’agit de contribuer à mettre en place de vrais rapports d’échanges, notamment en commençant par mettre en place des outils d’apprentissage et de formation sur le Net et aussi en favorisant la coopération   pour la recherche. Ce programme a aussi pour ambition de mettre en place un programme universitaire et des bourses pour les doctorants, exclusivement du Sud,  et nous avons eu l’immense plaisir de voir que notre plaidoyer a abouti  à la bourse qui s’appellera  Bourse Thomas Sankara, ce qui est un hommage à notre leader. Pour le choix du nom, il y avait d’autres candidats, notamment de grandes figures connues du monde entier et, finalement, c’est le choix de Thomas Sankara qui a été fait et c’est en partie grâce au Balai citoyen. Nous sommes sur beaucoup d’activités qui ne sont pas forcément des activités coup de poing-là où on aimerait nous voir. Il y a beaucoup de choses qui se font.

 

« Nous avons toujours assumé cette insurrection»

 Vous avez arrêté les opérations coup de poing, est-ce à dire que tout va bien au Burkina ?

 Cela  ne veut pas dire que nous ne sommes pas capables de mener des opérations coup de poing tout le temps. Comme je le dis,  il ne faut pas mener des actions  pour  mener  des actions. D’abord,  il faut éviter de décourager les gens qui luttent, parce qu’ils ne sont pas si nombreux que cela. C’est un travail bénévole et on ne cessera jamais de le dire,  c’est un engagement patriotique qui vous coûte en temps, qui pèse sur vous et votre famille. On dit que seul la lutte libère, et quand vous menez des luttes et qu’elles n’aboutissent pas, vous finissez par décourager vos camarades. L’objectif du mouvement, c’est de mener des actions certes, mais des actions qui portent des fruits. Il ne faut pas que ça finisse en queue de poisson, et que finalement, la montagne accouche d’une souris. On y va quand on est sûr de nos moyens d’actions et quand l’esprit de la Nation est véritablement en danger. Il y a toujours ce souci de préserver une certaine cohésion, une certaine stabilité du pays qui est issue de nos individualités. C’est dans ce cadre-là que durant l’insurrection,  nous avons tout fait pour ne pas pousser nos camarades à marcher sur Kosyam. C’était pour éviter d’enregistrer des pertes en vies humaines. Malheureusement, il y en a  eu. Sinon,  ce n’est pas  que la situation actuelle nous convient, non,  elle ne nous convient pas. Encore une fois, ce gouvernement, qu’on le veuille ou pas, qu’on l’aime ou pas, est légitime. C’est le peuple burkinabè qui l’a élu. Il a un mandat de 5 ans, renouvelable une fois. Je crois que le peuple a la possibilité de le sanctionner ou de le gratifier lors de ces élections à venir. Et c’est cela la démocratie. Ce n’est pas autre chose. On ne se lève pas pour dire à quelqu’un de dégager du pouvoir sans avoir les arguments solides et convaincants pour empêcher les règles du jeu démocratique de se mettre en branle.

 Vos détracteurs vous accusent davoir contribué à installer une chienlit au Burkina Faso, en chassant Blaise Compaoré. Que leur répondez-vous ?

 D’abord,  s’il fallait répondre à tous nos détracteurs, comme le disent certains de nos camarades, on n’allait  pas s’en sortir. Et si chienlit il y a, c’est qu’elle n’a démarré ni avec le Balai citoyen, ni avec tout ce qui s’est passé par la suite, ni avec l’insurrection populaire, mais plutôt avec Blaise Compaoré. Je rappelle que c’est le régime qui a été  le plus sanguinaire de toute l’histoire politique du Burkina Faso. Des élèves, étudiants, journalistes ont été assassinés, des politiques ont été grenadés, bombardés, etc., et n’en parlons pas des crimes économiques qui, jusqu’aujourd’hui,  on le doit encore à ce régime de la quatrième république. De quel détracteur donc parle-t-on ? Parce que si on est objectif, en dehors de l’ex- parti au pouvoir, c’est-à-dire le CDP,  et les intérêts personnels de certains individus liés au clan de Compaoré, mais tout le reste du peuple était dans l’insurrection. Tout le reste du peuple était pour ce changement radical et contre la modification de l’article 37,  y compris la grosse majorité des médias, y compris le journal « Le Pays » lui-même qui avait de nombreux éditos à l’époque. Son fondateur lui-même s’est fendu d’une lettre sur le non-alignement de votre ligne du journal sur la modification de l’article 37. S’il y a des détracteurs, ce ne sont pas des détracteurs du Balai citoyen, ce sont des détracteurs du peuple. La réalité est là et ce n’est pas parce que les gens estiment que la situation actuelle ne leur convient pas, qu’il faut forcément trouver un responsable. S’il y en a un à trouver. Le responsable, c’est bien la gabegie, c’est bien la corruption qui existe encore aujourd’hui, malheureusement, dans ce régime. Ce sont  tous ces crimes  qui ont été commis avant. Nous n’avons fait notre devoir de patriotes comme des millions d’autres Burkinabè. D’autres sont des acteurs de la société civile comme nous. D’ailleurs,  on nous prête un trop grand rôle  dans ce changement. Bien vrai que nous assumons ce changement. Et même si c’était à refaire,  nous le referions sans hésiter  si la situation le recommandait. C’est dire qu’en ce qui concerne des questions d’intérêt national, ce sont  des choses qu’on ne peut pas éviter. Nous avons toujours assumé cette insurrection, nous avons assumé cette résistance au putsch comme nous assumons les activités que nous menons comme actions citoyennes, etc.  C’est un changement de mentalités qu’il faut au Burkina Faso. Nous sommes dans une étape évolutive que j’ai traduite dans mon dernier album « Révolution », donc cette révolution sous-entend que les citoyens prennent conscience des outils qui ont été mis à leurs disposition, notamment les outils démocratiques, la liberté d’expression, du droit de contester certaines décisions, d’obligation de nos gouvernants en termes de redevabilité, etc. Si le citoyen burkinabè prend conscience de cette mission,  il va se rendre compte que,  comme le disait le camarade Ra sablga Seydou Ouédraogo, ce n’est pas autrui qui est responsable de mes malheurs,  c’est moi-même qui suis en partie responsable. Du reste, le Balai citoyen n’est pas le seul mouvement burkinabè qui a le monopole de la lutte,  si on estime que nous ne faisons pas bien notre travail, je crois que chacun peut aussi le faire de son côté pour qu’ensemble,  nous y arrivions. Trop de viande ne gâte pas la sauce. Ces détracteurs-là ne sont pas les ennemis du Balai citoyen, ce sont les ennemis du peuple. Toutes les actions qu’on nous prête, sont des actions qui ont été faites en  concertation avec les forces vives de la Nation et c’est historique, c’est quelque chose qui est admirée dans tout le reste du monde. Mais on n’est jamais prophète chez soi… Je pense qu’il ne faut pas qu’on se trompe de combat, il ne faut pas qu’on attaque les victimes, celles-là qui ont un amour pour leur patrie, il ne faut pas se tromper d’agresseurs. Les vrais agresseurs,  c’est ceux-là qui sont dans la gestion politique chaotique du pays, nous, nous ne sommes pas aux affaires, le Balai citoyen n’est pas dans l’Exécutif, il n’est pas impliqué dans les prises de décisions qui, malheureusement,  peuvent servir et desservir le pays.

 

« Vous ne pouvez pas être membre ne serait-ce  que de la plus petite instance du Balai citoyen, et être dun parti politique»

 

Votre compagnon Guy Hervé Kam, sest finalement engagé dans la politique, en créant le mouvement SENS, comment avez-vous accueilli cela ?

 Mais  c’est une très bonne chose. Nous, nous prenons acte, parce qu’il faut du courage aussi pour se lancer dans la politique, pour peu qu’effectivement, nos anciens camarades qui ont démissionné de nos instances,  continuent de suivre  cette ligne intègre, cette honnêteté intellectuelle, et continue de gagner en crédibilité. Nous applaudissons car nous travaillons au rafraichissement de l’offre politique, parce que c’est cela aussi l’objectif. Que les vieux crocodiles quittent la mare et que cette jeunesse qui est la plus représentative,  y compris la femme surtout,  qui est  exclue du jeu politique,  puisse à son  tour montrer qu’elle a les capacités pour  gérer le pays. Le combat que le peuple burkinabè a mené, a eu un principal effet : il a éliminé de nombreux privilèges, comme quand Sankara est arrivé au pouvoir. Il y a beaucoup de gens qui ont pensé qu’un après-Blaise Compaoré n’était pas possible, que c’était le seul homme qui était capable de diriger le pays, ce qui était d’ailleurs une insulte à l’intelligence collective et individuelle de la vingtaine de million de Burkinabè. Nous pensons que la relève doit se mettre en place, pour peu qu’effectivement, nous ne nous trompions pas de combat, comme le disait Norbert Zongo, de se poser les bonnes questions. Si tu te demandes qu’est-ce que le Balai citoyen fait, qu’est-ce que Smockey fait, tu poses mal la question. Tu devrais commencer par dire qu’est-ce que moi je peux faire pour aider ceux-là qui  me paraissent fatigués et que je ne trouve pas trop actifs ?

Avez-vous été contacté pour  militer dans ce  mouvement?

Non, pas du tout, notre situation est très claire, notre charte,  au niveau du mouvement,  interdit à tout militant du Balai citoyen d’être membre d’un parti politique. Vous ne pouvez pas être membre ne serait-ce  que de la plus petite instance du Balai citoyen, et être d’un parti politique. Vous devez auparavant démissionner. Ma position a été claire, je suis dans la société civile, je reste dans la société civile, parce qu’il faut aussi qu’une société civile soit forte. Il ne faut pas juste un appareil politique ou un exécutif fort, il faut aussi une forme de contre-pouvoir forte. Tant que j’aurai encore de l’intérêt pour l’action de la société civile,  je continuerai à le faire. Mes camarades savent exactement qu’elle est ma position, ils n’ont pas besoin de me demander si je veux m’impliquer dans un parti politique. Du reste,  si je devais le faire,  je devrais forcément démissionner des instances du Balai citoyen. Pour l’instant,  je continue à croire en  cette valeur. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas dans l’appareil politique qu’on ne peut pas agir pour faire en sorte qu’une politique au service des populations, soit mieux menée. Nous,  on ne peut que féliciter l’apparition de tout groupe politique, et surtout s’il est jeune et qu’il sort des sentiers habituels, parce que cela  participe à l’offre et donne la capacité aux électeurs de se prononcer pour un vrai choix. Ce sont nos anciens camarades, mais cela  n’empêche pas que,  si à leur tour,  la même gabegie continue, nous soyons les premiers à leur sauter dessus, et cela aussi ils le savent. Et comme je le dis toujours, le Balai citoyen est une école. Quand on vient,  on apprend et l’objectif c’est cela. Les jeunes qui ont participé au projet Alliance jeune parlementaire au nombre d’environ 300, ont fini leur apprentissage. Nous avons signé une convention avec l’Assemblée nationale pour leur permettre de toucher du doigt les réalités des parlementaires et beaucoup d’entre eux témoignent que depuis la création de ce programme, ils envisagent de s’impliquer en politique et de devenir des parlementaires. C’était cela l’objectif, notamment susciter la graine de l’engagement dans la politique en eux, et  que la jeunesse arrête de dire que la politique, c’est là où tu vas quand tu as tout raté, etc.

 Nenvisagez-vous pas dans le futur une carrière politique ?

 Chaque citoyen burkinabè doit envisager de faire une carrière dans la politique, s’il a,  à un moment X ou Y, la conviction qu’il peut apporter quelque chose pour changer positivement son pays. Pour le moment,  je n’y pense même pas parce que ce n’est pas dans mes objectifs.  Mon objectif,  c’est de continuer ma carrière d’artiste-musicien. Je rappelle aussi que je milite dans le Balai citoyen en tant que citoyen. Tout citoyen doit se sentir responsable de l’environnement dans lequel il vit. Si l’espace est sale, même si tu ne contribues pas à le salir, tu es comptable de sa salissure que tu subis aussi, tu es donc interpellé à agir. Pour le moment,  je pense que je peux apporter ma pierre au niveau de la société civile et au niveau de mes œuvres artistiques pour continuer cette conscientisation. Peut-être qu’un jour,  si les cloches de l’Angélus sonnent et que je me rends compte que sincèrement, je peux agir dans le sens de l’amélioration des conditions de vie de mes frères et sœurs du Burkina, et que c’est une volonté générale,  je m’engagerai. Pour l’instant, je n’envisage même pas de le faire, et même si je devais le faire, il faudrait que toutes les conditions soient réunies. Que ça ne soit pas uniquement et purement pour des ambitions de conquête du pouvoir, car,  malheureusement,  nos hommes politiques sont prêts à conquérir le pouvoir mais pas à l’assumer.  Dès qu’il s’agit de l’assumer,  c’est la débandade. Ils luttent comme des malades pour être dans la maison, mais une fois dedans, ils perdent tout le monde, y compris les occupants, le voisinage et tout le quartier, ils se battent pour être à la table de poker mais une fois à la table,  ils se rendent compte qu’ils ne savent pas y jouer. On a vu le cas pendant l’insurrection populaire où certains n’étaient pas préparés à la déroute de Blaise Compaoré. On a failli avoir 4 ou 5 présidents. On n’avait pas préparé cette éventualité de la gestion du pouvoir elle-même. Il ne faut pas être plus royaliste que le roi. Moi,  je n’ai pas de formation politique classique, je n’ai pas fait les Sciences politiques. Ce n’est pas sûr que je serai plus efficace que quelqu’un qui est dans l’Exécutif. Pour autant,  cela  ne veut pas dire que je ne ferai pas non plus mieux que ceux qui sont aux affaires. C’est pour dire qu’il suffirait qu’un chef d’Etat d’un pays africain soit simplement honnête, pour que nos pays connaissent un boum économique de développement, un havre de paix.

 En tant que membre dune OSC,  comment appréciez-vous la loi qui interdit les campagnes déguisées ?

 D’une part,  on peut d’une certaine façon, encourager le fond, puisque je suppose que cela part d’une bonne volonté de rééquilibrer le jeu, pour ne pas que certains adversaires aient plus de couvertures médiatiques et d’autres pas. D’autre part, on peut quand même critiquer la forme. D’abord,  comme certaines personnes le disent, on a permis d’une certaine façon au pouvoir en place, d’utiliser l’appareil de l’Etat pour continuer à faire une  sorte de campagnes déguisées, ce qui n’est pas forcément très démocratique, par rapport à l’opposition. Ensuite,  nous sommes en période pré-électorale, et cela est un  profond manque à gagner pour les  médias qui vivent de beaucoup d’activités politiques. A-t-on  prévu une compensation pour les médias qui n’ont plus finalement cette matière pour alimenter leurs programmes ? Le Conseil supérieur de la communication (CSC) a du travail, peut-être pas lui seul. Mais on peut déplorer que cette loi qui est censée exclure positivement, n’exclut pas tout le monde. C’est ce qu’il y a à critiquer dans cette loi. Sinon, elle  est louable mais son application,  en réalité,  fait le jeu d’une certaine partie, et ce n’est pas forcément démocratique.

La modification envisagée du code électoral, fait débat en ce moment. Quel est votre commentaire sur le sujet ?

 Si c’est pour renforcer la question de démocratie, on n’a rien à dire. Si la  modification permet de renforcer un camp plus qu’un autre, là, ça ne va pas. On repart encore sur la question de l’équilibre des forces en place. Il faut donner  la possibilité aux  uns et aux autres d’avoir accès aux mêmes droits. C’est cela la démocratie. Mais si cette modification dessert un camp au détriment  d’un autre, il va sans dire que ce n’est pas une bonne reforme. Mais à ce que je sache, ceux qui sont principalement interpellés, sont surtout les opposants. Pour l’instant,  je ne sais pas si les opposants en ont parlé, mais je sais qu’ils auront leur mot à dire. On gagnerait à faire en sorte que tous les acteurs politiques et même de la société civile, soient impliqués, qu’ils aient leurs avis à donner par rapport à cette  modification, afin de s’assurer qu’il n’y a pas un abus quelque part qui privilégierait un camp au détriment d’un autre.

 Où en êtes-vous avec la mise sur pied du Studio Abazon ?

 Le studio Abazon se situe maintenant au quartier Wemtenga. Il est vrai qu’on a eu à déménager à plusieurs reprises, malheureusement. Nous aussi, on s’est reconstruit, on est en pleine résilience, les activités sont en train de repartir. On projette de mettre en place une résidence artistique qui va nous permettre de nous attaquer à des projets plus créatifs. Donc,  on a besoin d’une résidence, et qui dit résidence, dit des logements, un studio d’enregistrement, de répétition, pour que des créateurs, qu’ils soient dans la musique, dans les arts plastiques et autres, puissent réfléchir à une vraie création, sur plusieurs semaines, plusieurs mois, voire plusieurs années, pour aboutir à un résultat suffisamment intéressant. On est en train de  mettre en place ce projet avec notre association ‘’Case en béton’’, donc on espère qu’on aura suffisamment de partenaires qui vont nous appuyer, parce qu’on pense que cela  peut constituer  une sorte de pépinière pour le milieu artistique.

On peut donc dire que ça va financièrement chez Smockey ?

 Je subis malheureusement le même contre-coup que la plupart de tous les citoyens burkinabè, même si, pour certains, comme on le dit, le malheur des uns, fait le bonheur des autres. La question de la crise du Covid-19 dans le milieu culturel, a déjà éliminé une bonne partie des revenus, notamment à travers l’annulation des spectacles, des tournées internationales et autres, puisque c’est récemment que les frontières ont commencé à s’ouvrir peu à peu, avec des conditions plus corsées. J’ai eu des festivals qui ont été annulés, je devais aller en Corée du Sud, cela  a été annulé  à cause du Covid-19, d’autres activités  qui étaient en cours en Allemagne, ont dû être reportées, mais on fait avec. Cela ne veut pas dire aussi qu’on n’a pas d’autres entrées. Vous savez,  il faut se réadapter tout le temps et constamment, donc on s’est  plus ou moins réadapté avec des projets plus structurels. On est maintenant sur des projets qui se préparent sur plusieurs années pour aboutir à un résultat. Mais, on continue de faire des séances studio, on vit un peu ce que chaque Burkinabè vit, avec des différences en fonction du genre que vous faites. On ne peut pas dire que c’est une année glorieuse, mais on se maintient.

 

« Lobjectif des élections est de permettre de rafraichir loffre politique»

 

Daucuns militent pour un report des élections au regard du contexte sécuritaire très difficile. Quen dites-vous?

 Nous avons déjà donné notre position par rapport à cela, et elle a été claire. Nous ne sommes pas pour le report des élections, nous sommes pour qu’elles se tiennent à bonne date. Ceci pour plusieurs raisons. Parce que cela pourrait ajouter de la crise à la crise. Il est vrai que c’est la situation sécuritaire qui est invoquée, mais nous pensons qu’il est du devoir de ce gouvernement de tout faire pour sécuriser la population. Du reste, si on veut parler du contexte sécuritaire, nous n’avons aucune garantie quant à  la fin de l’insécurité. On ne sait pas quand est-ce que cela  va s’arrêter avec toute la bonne foi qu’on peut accorder à   ce gouvernement ou à celui qui viendra. Faut-il donc attendre éternellement que la sécurité se rétablisse et est-ce qu’on ne va pas permettre, du même coup, à un régime de sortir de la loi ? Nous pensons que ces élections peuvent se tenir pour peu que la question de la sécurité soit vraiment prise au sérieux. Aussi, l’objectif des élections est de permettre de rafraichir l’offre politique et de sanctionner ceux-là  dont on estime qu’ils n’ont pas fait correctement le travail. Nous ne sommes pas pour le report des élections ; il faut qu’elles se tiennent à bonne date et ce gouvernement est censé garantir la sécurité de tous les Burkinabè. Il ne peut pas s’en dédouaner. Un gouvernement responsable doit mettre tout en œuvre pour que nous ressentions qu’il y a une véritable volonté de sécuriser tout Burkinabè où qu’il se trouve.

 Il se murmure que Smockey aurait divorcé d’avec Kadi Traoré. Quen est-il réellement ?

 Je pense que si c’était officiel, ça se saurait. Ce sont des histoires de potins, moi je ne m’intéresse pas à qui sort avec qui, ou ne sort pas avec qui. Je crois qu’il y a plus important que cela. Quel couple n’a pas de problème ? La vérité, si c’était le cas, je vous le dirais. Je pense que beaucoup font l’erreur de devancer l’iguane dans l’eau, puisqu’on court après une certaine forme de scoop, mais tout ce qui a trait à la vie privée, moi je pense qu’il faut laisser les acteurs eux-mêmes en parler. S’ils n’en parlent pas,  c’est qu’il n’y a rien d’officiel ni de concret. En tout cas, il n’y a pas encore de pavé dans la mare, lorsque ce sera le cas,  je répondrai par l’affirmative sans hésiter.

 Interview réalisée par Frédéric TIANHOUN

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