Au Nigéria, pour la première fois depuis 1999, c’est un opposant qui remporte la présidentielle. Muhammadu Buhari, un ancien général, de confession musulmane et originaire du nord du pays, accède à la magistrature suprême. Après quatre tentatives infructueuses, Buhari semble avoir trouvé la bonne formule : il s’est entouré d’une coalition forte, qui lui a permis de remporter cette élection.
C’est la première fois depuis 1999 que l’opposition ne se présentait pas en rang dispersé. Les quatre partis d’opposition qui ont fusionné pour former l’APC en 2014 ont choisi leurs candidats communs lors d’une primaire qui a donné au général Muhammadu Buhari une certaine légitimité. Le président sortant, lui, s’est rendu au scrutin avec une machine électorale PDP affaiblie.
De nombreux sénateurs et gouverneurs ont fait défection en 2014 pour grossir les rangs de l’opposition, et Olusegun Obasanjo, ancien chef d’Etat et poids lourd du PDP, a lâché Jonathan, dans une lettre publique qui a sans doute causé du tort au président sortant dans les bureaux de vote du sud du pays.
Un contexte économique dégradé
Les Nigérians se rendaient aussi aux urnes dans un contexte économique dégradé, lié en partie au cours du pétrole qui a chuté ; or, le Nigéria, est le premier producteur d’or noir du continent. Sur le plan sécuritaire, de nombreux Nigérians ont été incrédules face à la passivité de l’administration Goodluck Jonathan devant la progression sanglante des insurgés de Boko Haram.
Buharu a su profiter de la grogne, dans son nord natal mais aussi dans le Sud, lors d’un scrutin à biométrie intégrale qui selon les experts, malgré quelques couacs, a permis d’éviter une fraude massive et a rendu la victoire de Buhari irréversible.
Des Nigérians frustrés
Sa victoire dans les Etats de Oyo, Ogun, Osun, Ondo et de Lagos, il les doit à l’un de ses alliés, le ACN. De même, Buhari gagne dans l’Etat de Edo grâce au Labour Party. En parallèle, Buhari, qui est originaire de Katsina dans le nord, bénéficie d’un gros réservoir de voix dans cette partie densément peuplée du pays. D’après les résultats prononcés par la Commission électorale, les Etats du nord lui assurent plus de 6 millions de voix.
Enfin, Buhari a surtout profité du bilan contesté de Jonathan, qui cristallise de profondes frustrations des Nigérians qui veulent en finir avec la corruption et la pauvreté. Voter Buhari, est synonyme de changement… un slogan qu’il a su habilement mettre en avant durant sa campagne électorale.