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Crise sécuritaire au Burkina : « La déstabilisation n’est pas possible tant qu’il n’y a pas de complicités à l’interne », selon Jonas Hien

Dans cette déclaration ci-dessous, l’auteur en la personne de Jonas Hien,  se demande ce que le Burkina Faso a fait pour « faire l’objet d’un plan de déstabilisation ». Face à cette situation, il appelle à l’union de tous les fils et filles du pays pour contrer l’ennemi.

 « Plus j’y pense, plus je me pose la même question ! Qu’est-ce que le Burkina Faso a pu faire de mal pour être l’objet d’un plan de déstabilisation bien réfléchi pendant plusieurs années ! Oui, le plan en vue de déstabiliser le Burkina Faso a duré au moins dix années avant de passer à l’exécution ! Quelle a pu bien en être la raison !

En 2012, lors d’une causerie avec un ami sous-officier de l’armée burkinabè, il m’a dit ceci : « Dans quelques années, notre pays va avoir des problèmes. Mais nous, on est petit, on ne peut pas parler. Ce qui est sûr, on soupçonne fort quelque chose de mauvais contre notre pays dans les années à venir. Des avions s’envolent de l’aéroport avec à bord des Blancs. Ils vont sur le territoire malien. Apparemment, ils font des cartographies en territoire malien et chaque jour, c’est le même scénario. Si ça va commencer, ce serait d’abord à partir du Mali et ensuite chez nous». Ces propos n’ont pas suscité en moi un intérêt particulier si bien qu’on n’a pas développé le sujet.

Lorsqu’à partir de 2013, le Mali a été attaqué suivi de l’intervention de l’armée française, un diplomate français, (un certain Hugot) sur les antennes de Radio France International (RFI), a déclaré qu’après le Mali, le deuxième pays qui connaîtra un effondrement sera le Burkina Faso. Monsieur Djibril Bassolet, ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso, à cette époque, avait, par le même canal de RFI, fustigé ce diplomate indélicat dénué de règles minimales en matière de diplomatie. La suite de l’histoire a donné totalement raison au diplomate français.

 Mais déjà en 2011, un jour, dans les environs de 10h, un ami européen m’appelle de l’Europe pour, dit-il, avoir de mes nouvelles. Il en profite pour me demander si ça va à Ouagadougou (en réalité c’était l’objet de son appel). Je lui réponds par l’affirmative en mettant cela dans le compte des salutations classiques connues aussi en Afrique. On parle alors d’autres choses avant de raccrocher. Autour de midi, il me rappelle pour savoir si ça va vraiment à Ouagadougou. Je lui réponds que je suis au centre-ville de Ouagadougou mais que je ne constate rien d’anormal. Il insiste et va jusqu’à me dire que je refuse de lui dire la vérité. Je commence à être agacé et à lui monter le ton. Il finit par me dire : «OK, je t’informe qu’il y aura une mutinerie militaire cet après-midi à Ouagadougou, donc, soit prudent ». Je lui réponds par un OK et on se sépare au téléphone. Dans la soirée, il me rappelle encore pour me demander si ça va à Ouagadougou. Je lui réponds que ça ne va pas du tout car «ta mutinerie-là a commencé». Dès l’instant, j’ai eu des mots durs à son égard : «J’ai tout compris. C’est comme ça que vous détruisez nos pays. Vos espions qui sont dans nos Forces de défense et de sécurité, arborant nos tenues militaires d’ici que vous appelez pompeusement ‘’Conseillers’’, ce sont eux qui vous informent de tout ça à l’avance. Soyez rassurés, on va vous chasser tous un jour de chez nous, espèces d’espions.» Notre conversation s’est donc très mal terminée. Je me disais qu’il n’allait plus jamais me parler. Mais on s’est parlé plus tard et notre amitié a continué. Et c’est là que j’arrive au sujet du plan de déstabilisation du Burkina Faso dont je parle.

Entre le début des premières attaques terroristes au Burkina Faso et ce dont je veux parler, environ dix années se sont écoulées. En effet, un autre ami, sous-officier supérieur de l’armée burkinabè (je pense que ça se dit quand on dépasse le grade de sergent-chef) m’a sollicité pour lui trouver un financement afin de construire une école primaire dans son village. Il se battait en même temps pour avoir un collège dans sa commune. Il m’a poursuivi pendant longtemps sur ce dossier. Je décide finalement d’aller voir l’état des lieux de son village en matière d’écoles. Nous avons traversé des cours d’eau, des pistes incroyables, à moto, pour déboucher dans le village, dans la région du Centre-Nord. L’état des lieux n’était pas du tout enviable avec des écoles sous paillotes. J’étais déçu.

Au retour, je contacte un autre ami, en Europe, pour lui demander de me trouver des financements pour construire des écoles dans mon pays car il y a encore beaucoup d’écoles sous paillotes. Suivez bien la réponse qu’il m’a donnée : «Mon cher ami, je peux te trouver des financements pour construire autant d’écoles que tu veux dans ton pays. Le problème, c’est que dans quelques années, vous n’aurez pas d’écoles dans votre pays. Donc, il faut bien m’excuser, ça ne sert pas de t’aider à construire des écoles qui ne vont pas servir». J’ai tout fait pour comprendre le sens de ses propos. Je n’y suis pas parvenu. J’ai laissé passer du temps avant de revenir à la charge. Il a refusé de m’en piper mot. J’ai réessayé une autre fois. Je n’ai pas pu percer le mythe. Il ne voulait pas qu’on parle de ce sujet.

J’ai rapporté ces propos à mon ami militaire. Lui aussi veut comprendre ce qu’il veut dire ! Je ne pouvais pas lui en dire plus. Il a laissé passer aussi du temps avant de me revenir à la charge pour comprendre ce que ‘’mon Blanc’’ là a voulu dire.  Je n’en savais toujours pas plus. Et le militaire de dire : «S’il ne veut pas nous aider, qu’il dise la vérité au lieu de dire des choses qu’on ne comprend pas!» Néanmoins, nous avons décidé de continuer à explorer ailleurs.

Au temps fort des attaques terroristes au Burkina Faso, cet ami militaire et moi nous nous sommes retrouvés pour remémorer les propos d’il y a près de dix ans. Et c’est là que nous avons tous deux eu la réponse nous-mêmes. C’était de ce plan de déstabilisation du Burkina Faso par le terrorisme qu’il parlait. Nous avons compris maintenant pourquoi il ne pouvait pas nous en dire plus. Ce sont les Africains qui se vendent eux-mêmes. Autour d’un petit déjeuner en compagnie de Blancs, ils déballent tout, pour montrer qu’ils sont informés, qu’ils connaissent leur pays. Ainsi, l’autre côté a le renseignement sur leur pays, sans frais. Il y a donc des choses qu’on ne dit jamais à l’étranger quand ça porte sur la survie ou la sécurité de son pays.

Depuis les attaques des groupes armés terroristes, le village de l’ami, dans le Centre-Nord, s’est vidé de sa population, tous déplacés internes. Il n’existe plus d’écoles là-bas. Si l’école avait été construite, elle aurait effectivement été détruite comme les autres. Dix ans auparavant, des gens, quelque part hors de l’Afrique, le savaient déjà. Cela veut dire qu’un plan a été conçu au moins dix années durant avant le début de l’exécution. Ça donne à réfléchir. Ça fait poser des questions ! Avec autant de compatriotes que nous avons perdus (Hommes habillés, populations civiles, enfants, femmes, vieillards;), autant de biens détruits dans les attaques terroristes, nous sommes en droit de comprendre ce qu’on a pu faire de mal pour être visé en mettant tout un plan bien conçu et peaufiné pendant des années. Ainsi, à y réfléchir, le terrorisme au Burkina Faso n’est pas du fait de la destruction de la Libye, une des causes de l’éparpillement du terrorisme au Sahel, qui est souvent citée. Le plan contre le Burkina Faso existait déjà avant la destruction de la Libye. Le cas de la Libye a certainement favorisé beaucoup de choses dans la mise en œuvre du plan. Quand je fais donc mes recoupements, avec le développement que je viens de faire, il faut chercher le plan de déstabilisation du Burkina Faso au de-là de la question libyenne. C’est pourquoi je continue à me poser mille et une questions.

Mon ami militaire, qui est encore en activité, se pose certainement la même question ! A la différence avec moi, il a encore mieux compris. En effet, il se bat au front contre des propos dont il ne comprenait pas le sens il y a plusieurs années maintenant. Il a aussi combattu au Mali aux côtés des autres forces étrangères et certainement qu’il a encore compris plus que c’est ce mythe là qu’on n’arrivait pas à percer.  Nous avions tous deux passés le temps à secouer la tête quand le terrorisme a commencé à faire ravage.

Si j’ai tenu à faire cette révélation, c’est à cause de l’orientation que le pays est en train de prendre sous l’impulsion des enfants-là (c’est comme ça que j’appelle les jeunes officiers actuellement au pouvoir qui sont venus nous mettre la honte, du fait de leur courage). Cette nouvelle orientation doit nous faire prendre davantage conscience que nous avons une lutte de longue haleine. Nous ne savons pas quel était l’objectif de départ de la déstabilisation du pays. Nous ne savons pas quels sont les dimensions du plan des commanditaires. Il faut donc en prendre conscience dès maintenant. La prise de conscience vient du fait aussi qu’en la matière, ceux qu’on utilise pour ces types de travaux secrets en ‘’laboratoire’’, peuvent être éliminés une fois l’objectif atteint pour ne pas laisser de témoins. C’est pourquoi l’amour pour la patrie est la bonne porte d’entrée et de sortie. C’est pourquoi aussi la question de l’unité des Burkinabè est impérative. Le rassemblement est donc impératif. Les autorités dirigeantes ne doivent pas le négliger, dans tous les corps socioprofessionnels.

La Nation, comme la culture, c’est ce qui reste quand on a tout perdu. Nous devons défendre le Burkina Faso par tous les moyens, en rassemblant tout le monde. La question aujourd’hui n’est pas qui est chef ou qui sera chef, mais comment on fixe tout droit le drapeau national pour qu’aucun vent ne puisse l’ébranler. Il est clair que la déstabilisation ne sera pas possible tant qu’il n’y a pas de complicités à l’interne. Il est aussi clair qu’en Afrique, quand vous pensez du mal de votre propre village, vous le payez toujours cash, tôt ou tard. Continuons le combat en tenant compte de cette piste. C’est le sens de la révélation que j’ai pris l’engagement de faire. Du point de vue de la tradition africaine, ne pas le faire, est considéré comme penser du mal de son propre village face à un danger qui le guette et dont on est au courant. Il faut donc travailler à comprendre pourquoi ce plan de départ contre le Burkina Faso, pour quel objectif à atteindre et les dimensions du plan. C’est dire que même si les forces combattantes venaient à recouvrer tout le territoire national, le défi demeure. Quel que soit le gouvernement qui sera mis en place après la Transition, cette piste n’est pas à négliger. Elle est sérieuse. Elle est à prendre en compte dans la surveillance du territoire national et dans la protection du pays.

Pour ma part, j’ai au moins une conviction. Ce pays-là ne va pas s’effondrer. La mobilisation actuelle des Burkinabè le démontre, avec en grande majorité les jeunes. Il faut maintenir la vigilance pour le reste de notre existence face à ce monde injuste où les plus forts ont tous les droits face aux Africains, surtout Noirs. Et je ne doute pas de nos ancêtres, au nom de Dieu Tout puissant ! »

 Jonas Hien 

photo: Libre info

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