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e jugement en appel des assassins présumés du défenseur des droits de l’Homme, Floribert Chebeya, a repris ce mardi 21 avril 2015 à Kinshasa. L’on se rappelle que le fondateur de l’ONG, La voix des sans-voix, avait été retrouvé mort dans sa voiture le 2 juin 2000. La veille, il s’était rendu à l’Inspection générale de la police congolaise avec son chauffeur, Fidèle Bazana, pour y rencontrer le patron de la police à l’époque des faits, le Général John Numbi.

A l’issue d’une enquête que les organisations de défense des droits de l’Homme ont qualifiée de bâclée, cinq policiers ont été condamnés dont 4 à mort et un à la prison à vie. La grande question que l’on peut se poser à propos de ce procès en appel, après près de deux ans d’interruption, est de savoir s’il peut véritablement contribuer à élucider toutes les zones d’ombre qui entourent jusqu’à ce jour l’affaire Chebeya.

L’on peut malheureusement y répondre par la négative. En effet, cette affaire dans laquelle serait impliqué, selon la famille de Chebeya, le Général John Numbi, s’apparente à un crime d’Etat. Cette hypothèse est d’autant plus plausible que Floribert Chebeya, de son vivant, était devenu de plus en plus corrosif dans sa critique de la gouvernance de Joseph Kabila. Or, tout le monde sait que le président congolais, en bon satrape, ne tolère pas que l’on fouine dans ses affaires au point d’en étaler les plus sordides sur la place publique, comme le faisait avec témérité, il faut le dire, le fondateur de La voix des sans-voix, Floribert Chebeya. Il fallait donc, peut-on dire, faire en sorte que celui qui avait pour credo de prêter sa voix aux sans-voix congolais, se taise à jamais. Car, de toute évidence, il constituait un danger pour Kabila fils dont la gouvernance, on le sait, a toujours été nauséeuse. Le président congolais avait, par conséquent, des raisons de l’éliminer. Et c’est ce qu’il semble avoir fait via son homme de main, le Général John Numbi. La thèse selon laquelle ce dernier fait figure de suspect numéro un dans l’assassinat de Floribert Chebeya, n’est donc pas farfelue. De ce point de vue, l’on peut expliquer pourquoi les avocats de la famille du fondateur de La Voix des sans-voix n’ont pas pu obtenir jusque-là et ce, malgré leurs demandes réitérées, la comparution du Général Numbi. Certes, celui-ci a été  débarqué de son poste de patron de la police, mais il sait que tant que son mentor sera aux affaires, il ne court aucun risque d’être inquiété dans le cadre de cette affaire. C’est pourquoi il n’est pas permis d’imaginer un seul instant, en l’état actuel des choses, que la reprise du procès en appel des assassins présumés de Chebeya, sera une avancée en termes de défense des droits de l’Homme et dans la lutte contre l’impunité en RDC ,  comme l’a laissé espérer José Maria Aranaz, le directeur du bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’Homme en RDC.

La RDC a cessé d’être un pays normal si fait que personne ne doit être étonné que l’on soit sceptique devant les explications du gouvernement

Une autre affaire ténébreuse à propos de laquelle l’on peut dire que ce n’est pas demain la veille que toute la lumière se fera, est celle de la fosse commune récemment découverte près de Kinshasa. Selon les autorités congolaises, elle renfermerait 421 corps qu’elles présentent essentiellement comme ceux de fœtus, d’enfants morts nés ou d’indigents. Elles soutiennent, par ailleurs, que les enterrements collectifs de ce genre sont fréquents dans une ville de dix millions d’habitants comme Kinshasa et où environ 600 personnes meurent chaque jour.

Mais quel crédit peut-on accorder à ces explications venant d’un régime comme celui de Joseph Kabila ? Aucun. Car la RDC, en réalité, a cessé d’être un pays normal si fait que personne ne doit être étonné que l’on soit sceptique devant les explications du gouvernement et que l’on soupçonne qu’il y ait parmi ces corps ensevelis à la sauvette, ceux d’opposants tombés sous les balles assassines du régime à l’occasion des journées de protestation contre le projet de révision de la loi électorale. C’est pourquoi l’on comprend l’Union européenne (UE), tout comme l’opposition et les organisations de défense des droits de l’Homme, quand elles se rejoignent toutes pour demander une enquête indépendante et crédible pour faire toute la lumière sur cette affaire.

Cela dit, ces deux affaires qui alimentent la polémique dans le pays, viennent s’ajouter à un chapelet d’autres affaires ténébreuses qui, jusque-là, gardent encore intacts tous leurs mystères. C’est pourquoi l’on peut légitimement se poser, à propos de l’affaire Chebeya et de celle des enterrements collectifs, la question suivante : connaîtra-t-on jamais la vérité ? L’on pourrait y répondre par la négative tant que Joseph Kabila et son clan seront aux affaires en RDC. Et comme le fait d’être au pouvoir garantit l’impunité, surtout en Afrique, l’on peut parier que Joseph Kabila fera des pieds et des mains pour y rester le plus longtemps possible. Cette éventualité aujourd’hui ne souffre d’aucune ambiguïté. Seulement, Joseph Kabila est conscient qu’il est en train de marcher sur des œufs.

« Le Pays »

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