A travers cette tribune,ย Dr Alain Zoubga, prรฉsident de l’autre Burkina/PSR fait son analyse de la situation nationale du Burkina, sous l’angle de la crise sรฉcuritaire. Il fait aussi des recommandations qui, selon lui pourront contribuer ร la rรฉsolution de la crise sรฉcuritaire que vit le Burkina depuis plusieurs annรฉes. Lisez plutรดt!
Depuis 2015, le Burkina Faso fait face ร une guerre injuste imposรฉe ร la sous-rรฉgion du Sahel. Pendant des annรฉes, les djihadistes ont eu le temps et la possibilitรฉ de sโinstaller dans nos villages et quartiers pendant que nos dirigeants donnaient une impression dรฉsastreuse de minimiser lโextrรชme gravitรฉ de la situation.
Par ailleurs, lโun des faits les plus caractรฉristiques, un fait gravissime, est lโenrรดlement chaque jour plus massif de nos propres enfants sous la poussรฉe religieuse et surtout sous lโappรขt des fortes sommes dโargent qui circulent dans nos villes et nos campagnes. Mais fort heureusement notre peuple refuse de tomber dans le dรฉsespoir, rรฉsiste et sโoppose ร la horde barbare.
En 2022, nous avions dit que ยซ cette guerre ย nous devons la gagner et nous allons la gagner mรชme au prix de notre sang ยป. Nous croyons ร notre peuple souverain, nous faisons confiance aux forces combattantes et nous implorons surtout la grรขce divine ย pour sauver le Burkina. La mobilisation citoyenne chaque jour plus grande, en faveur de lโeffort de guerre, les priรจres dans les mosquรฉes, les รฉglises et les temples reprรฉsentent un grand espoir.
Dans le pire des cas, les gardiens de nos traditions sacrรฉes seront dans lโobligation de taper le ยซ Tamtam sacrรฉ de guerre ยป ! Et lโhistoire nous enseigne quโaucun peuple dรฉterminรฉ nโa รฉtรฉ vaincu par des bandits armรฉs.
Au moment mรชme oรน nous rendons publique notre analyse contextuelle, le Prรฉsident de la transition nous a accordรฉ une belle sรฉance de travail regroupant les 04 grandes composantes de la classe politique. Nous sortons satisfaits de cette rencontre avec plus de confiance. Dans la forme, ce fut une rencontre cordiale trรจs sรฉrieuse.
A cette occasion notre porte-parole, le Prรฉsident Eddie KOMBOIGO a apportรฉ publiquement le soutien patriotique de la classe politique ร la transition mais il a aussi prรฉsentรฉ nos prรฉoccupations en tant forces politiques.
Dans son message le prรฉsident de la Transition a dรฉclarรฉ dโemblรฉe, ยซ je ne vais pas vous mentir car je ne sais pas mentir ยป. Le dรฉcor รฉtait ainsi plantรฉ. Et lโexposรฉ sur la situation de cette guerre, fut sans conteste le moment fort de cette rencontre.
1-Sur les champs de batailles, aprรจs des annรฉes de combats selon certaines informations et suite ร lโexposรฉ du Prรฉsident, il apparait clairement que la guerre a pris de lโampleur. Presque partout sur le territoire national, les combats font rage, la guerre de survie et de reconquรชte est en phase de flux, et l’on pourrait dire que la guerre est presque totale.
La stratรฉgie gรฉnรฉrale de nos forces armรฉes semble avoir รฉvoluรฉ et elle parait plus offensive. Cependant, cette guerre pourrait รชtre encore longue, difficile et coรปteuse.
Par consรฉquent, il ne faut surtout pas baisser la garde. Parmi les grands axes stratรฉgiques, nous retiendrons le rรดle et la place des VDP, la participation du peuple ร lโeffort de guerre, le tout chapeautรฉ par un dispositif juridique suite ร avis favorable du Conseil Constitutionnel (CC) autorisant la mobilisation gรฉnรฉrale et la mise en garde.
Le gouvernement dispose donc de ce dispositif juridique qui lui donne le pouvoir de requรฉrir les personnes, les biens et les services. Dans ce contexte, contrairement ร lโexpรฉrience de la transition des colonels en 2015, il faut absolument se focaliser sur les moyens et mรฉthodes ร mรชme de faire avancer notre lutte contre le terrorisme, loin des considรฉrations personnelles voire sectaires.
Lโinstitutionnalisation des VDP reprรฉsente un axe dโintervention stratรฉgique trรจs important et surtout innovant. Dรฉsormais cette guerre semble ne plus รชtre seulement celle des รฉlites de lโarmรฉe.
La force de dรฉfense citoyenne (VDP) est devenue au fil du temps la puissance de frappe complรฉmentaire tant souhaitรฉe. Et le redรฉploiement de certains dans des zones dont ils ont une connaissance avรฉrรฉe des rรฉalitรฉs sera un atout qui rassure.
Ainsi ces VDP se battront pour prรฉserver leur village, leur quartier, ce qui symbolise leur mรจre patrie. Dรฉsormais, cโest une guerre des diffรฉrentes nationalitรฉs de notre peuple pour dรฉfendre la terre sacrรฉe de leurs ancรชtres.
Au moment mรชme oรน se joue lโavenir immรฉdiat de notre nation, notre soutien ร la Transition et aux forces combattantes, est un devoir patriotique sincรจre, en dโautres termes ยซ Ya Tilรจ ยป.
Lโunion sacrรฉe tant revendiquรฉe, mais en vain, depuis Roch et Damiba, est ร ce prix ! Mais tout processus dโunion sacrรฉe du peuple, relรจve avant tout des pouvoirs du Prรฉsident.
Aussi, nous recommandons ร la direction politique de la Transition de veiller ร ce que tous nos concitoyens se dรฉmarquent des discours extrรฉmistes, divisionnistes qui mettent en danger le vivre ensemble et la cohรฉsion sociale, nous รฉloignant de lโindispensable Union sacrรฉe au sein du peuple.
2-Ladoption des mesures dโexception sโest traduite par lโinstitution dโun mรฉcanisme citoyen de contribution volontaire ร lโeffort de guerre.
Quant ร la taxe proprement dite sur les boissons, elle est pertinente et les citoyens lโacceptent avec beaucoup de dignitรฉ. Lโon peut รฉpiloguer sur une possible contribution propre de ces sociรฉtรฉs en termes de prestation de services, mais cette contribution est celle des citoyens et non pas celle de la SODIBO. Ces taxes frappent prioritairement et directement les classes moyennes aux revenus limitรฉs et dรฉjร confrontรฉes ร la vie chรจre.
Aussi nous suggรฉrons au gouvernement dโinstaurer une taxe directe sur les gros bรฉnรฉfices de ces sociรฉtรฉs de brasserie qui accumulent richesses sur richesses, milliards sur milliards sur le dos de nos concitoyens consommateurs ; et pire ces milliards ยซ franchissent ยป souvent nos frontiรจres pour dโautres pays. Cette formule permet de rรฉparer une injustice et cโest sans doute un moyen efficace dans lโatteinte de lโobjectif fixรฉ pour le Fond de Soutien Patriotique(FSP).
En outre, il faudrait aussi regarder du cรดtรฉ des Sociรฉtรฉs trรจs riches de tรฉlรฉphonie mobile du pays! Le citoyen burkinabรจ, celui des classes moyennes en particulier et le monde du travail en gรฉnรฉral, ne peuvent pas comprendre pourquoi tant de fleurs et de primes donnรฉes aux patrons des brasseries.
Une autre mesure exceptionnelle pourrait รชtre prise en rapport avec lโengagement des FDS qui ont toujours constituรฉ le principal rempart de protection de notre peuple. La guerre pourrait encore durer et cโest pourquoi, mรชme si ยซ LE TOUT MILITAIRE ยป a ses limites, nous pensons que le leitmotivย actuel devrait รชtre ยซ Tout homme de tenue au front ยป, quelle que soit sa position et suivant les dispositions en vigueur.
3-Dans le domaine des droits socio-politiques et humains, le Burkina nโรฉchappe pas aux effets nรฉfastes de la crise sur ces droits. Pour autant il serait dangereux de remettre en cause certains des droits fondamentaux.
Un modus vivendi est indispensable entre les gouvernants et les gouvernรฉs afin de prรฉserver les fondements basiques de ยซ lโรtat de droit dรฉmocratique ยป, la nature rรฉpublicaine de lโรtat et sa laรฏcitรฉ. Mais ne lโoublions pas, ยซ aucun texte nโest au-dessus de la rรฉalitรฉ ยป.
i)-Dans le domaine des droits politiques depuis lโรฉclatement de la crise sรฉcuritaire, les รฉlections sont rรฉguliรจrement remises en cause dans divers milieux. Certaines personnes bien avisรฉes disent que ยซ la sรฉcuritรฉ prรฉcรจde la dรฉmocratie ยป. Difficile de rejeter un tel point de vue mรชme si ร lโabsolu, il semble limitรฉ. En effet, il est aussi bien reconnu que ย sans ยซ dรฉmocratie pas de stabilitรฉ sociopolitique ยป, donc pas de paix durable.
Aujourd’hui, au sein de lโopinion publique nationale, lโon observe lโรฉmergence de deux (02) courants tous extrรฉmistes, lโun opposรฉ ร toute idรฉe dโรฉlections et lโautre exige des รฉlections coรปte que coรปte. La tenue des รฉlections est inscrite dans lโagenda de la Transition et sur cette question, dans une dรฉclaration conjointe, nous avions dรฉjร dit au mรฉdiateur de la CEDEAO:ยซย Dโabord sauvons nos soldats, sauvons la patrie, sauvons notre nation ! ( ). Les รฉlections peuvent attendre, tรดt au tard elles auront lieu ยป. Toutefois, il ne sโagira pas de ruser avec le peuple en usant du vacarme de la rue contre lโรtat de droit.
Dans ce sens, nous nous rรฉfรฉrons ร une voix plus autorisรฉe, celle du Prรฉsident de la transition qui, sur les antennes la VOA, disait il y a quelques mois: ยซโฆle calendrier de la CEDEAO est largement suffisant car ils nโont pas besoin de 02 ans pour atteindre les 60% ยป. Puis il prรฉcise, ยซ ce nโest pas le pouvoir qui intรฉresse les gens ยป. Et ร Kaya le chef de lโรtat a dรฉclarรฉ : ยซQuโont-ils fait ? (โฆ.). Que la transition finisse aujourd’hui ou demain, retenez ce message. Ceux qui vont relever, amenez les ร faire le nรฉcessaire pour la jeunesse. Nous allons tracer ces sillons et tout ce qui peut รชtre fait au cours de cette transition nous le ferons ยป.
Cette grande interrogation relative ร lโhรฉritage de nos devanciers semble lรฉgitime et ce malgrรฉ la controverse suscitรฉe.
Et ces deux (02) citations renferment en elles 02 grandes valeurs morale et รฉthique: lโune incarne ici le respect de la parole donnรฉe de lโofficier au moment de prendre en charge et dโaccomplir sa grande mission de sauvegarde et de restauration du territoire national occupรฉ et qui affirme solennellement sa ferme volontรฉ de respecter le calendrier de la transition car, dit-il, ยซ ce nโest pas le pouvoir qui intรฉresse les gensยป, cโest-ร -dire ยซ sa ยป nouvelle รฉquipe qui vient de sโinstaller au pouvoir : lโautre porte sur lโengagement de l’officier, dรฉsormais prรฉsident de la transition, ร ย tracer les sillons et ร faire tout ce qui peut รชtre fait au cours de cette transition.
Quant au ministre en charge de la sรฉcuritรฉ, il insiste sur (02) deux aspects clรฉs du combat en cours ร savoir, le devoir absolu de gagner la guerre et lโimportance cruciale de lโรฉtape de 2024 :ยซ Nous ne pouvons pas nous autoriser une possibilitรฉ daller en 2024 avec cette situation (โฆ) Cโest une รฉtape existentielle et nous sommes obligรฉs de gagner cette รฉtape ยป.
La charte sera respectรฉe, la transition prendra fin tรดt ou tard et le tout se traduira par la restitution au Peuple de son pouvoir souverain. Certes, les gens sont devenus par expรฉrience des ยซ St Thomas ยป, mais ne soyons pas plus royaliste que le roi ; nous devons croire, ร la parole donnรฉe et ร lโengagement pris devant le peuple souverain.
Sur un plan plus global le ยซ rรชve ยป de certains acteurs de transformer la transition dรฉmocratique du peuple en rรฉvolution dรฉmocratique est lรฉgitime ร nos yeux, mais nous leur demandons de faire attention aux raccourcis politiques.
En tout รฉtat de cause, pour lโavรจnement dโun rรฉgime rรฉvolutionnaire il ne suffit pas de reconnaรฎtre lโรฉtat de crise avec ses conditions objectives, dโen appeler ร gorge dรฉployรฉe ร la Rรฉvolution et ร lui donner un contenu ; il faut surtout identifier la dรฉmarche stratรฉgique ร suivre. Les rรฉvolutionnaires du 04 Aoรปt ne rรชvaient pas, ils avaient un rรชve !
Toutefois, la refondation annoncรฉe peut avoir un contenu rรฉvolutionnaire avec des rรฉformes fondatrices pour tracer les sillons et creuser les fondations dโun autre Burkina, celui de demain. Mieux, dans ce contexte gรฉnรฉral, oรน lโรฉpoque de la rรฉvolution par les ยซ Kalatch ยป semble rรฉvolue.
Dรฉsormais, il faut faire la Rรฉvolution par la preuve et les rรฉvolutionnaires ont la possibilitรฉ de proposer au peuple un programme progressiste dans le but de conquรฉrir le pouvoir dโรtat. Au Burkina Faso, le niveau de reprรฉsentation du courant dรฉmocratique de la gauche rรฉvolutionnaire au sein du peuple nโest pas nรฉgligeable. La jeunesse pourra aller ร la conquรชte du pouvoir dโรtat ร travers son arme de lutte, son parti politique dit ยซ de type nouveau ยป. Mais elle doit sโattendre ร des luttes concurrentielles trรจs serrรฉes et ce ne sera pas une simple partie de plaisir.
ii)- Depuis la nuit des temps, presque partout sur tous les continents, les forces politiques et les hommes politiques sont considรฉrรฉs comme les principaux voire les seuls responsables, des maux de la sociรฉtรฉ.
Aucune surprise, si chez nous, les diffรฉrents rรฉgimes de transition ont surfรฉ ร souhait sur ce constat pour se faire une place au soleil en faisant parfois appel ร leurs soutiens inconditionnels pour occuper les rues.
En rรฉalitรฉ, ils veulent รฉliminer les potentiels adversaires aux รฉlections post-transition en s’adossant au pouvoir politique de transition (la transition de 2015 et les OSC sous Damiba en sont des exemples bien connus. Et mรชme si depuis les annรฉes 60, lโarmรฉe a รฉtรฉ maitresse du jeu politique, la campagne anti partis ne faiblit pas !
Au niveau des dรฉtenteurs du pouvoir dโรtat, les premiers responsables sont rรฉguliรจrement intervenus, chacun pour expliquer sinon pour justifier la dรฉcision de suspension de nos activitรฉs. A ce jeu, nous avons pu apprรฉcier la rรฉaction comprรฉhensible et responsable du MATDS.
Puis lors de notre derniรจre rencontre, le Prรฉsident de la transition himself a apportรฉ des rรฉponses objectives trรจs positives ร nos prรฉoccupations relativement ร la place et au rรดle des partis politiques dans la conduite de la transition, plus spรฉcifiquement le rรฉexamen de la dรฉcision de suspension de nos activitรฉs et enfin la mise en place d’un mรฉcanisme de concertation avec les forces politiques.
Bien entendu il y a aussi ceux-lร qui affichent turlututu une certaine dรฉfiance, envers la classe politique soupรงonnรฉe de travailler contre la ยซ marche radieuse ยป de la transition.
Pourtant les partis politiques nโont aucun intรฉrรชt ร saboter le travail de la transition car dans le fond cโest leur transition, et ils seront parmi les principaux bรฉnรฉficiaires ร la fin du processus.
iii)-La pratique de lโinformation et de la communication est trรจs compliquรฉe en cette pรฉriode de guerre. lโรtat burkinabรจ est menacรฉ et de ce fait la problรฉmatique principale porte sur comment assurer aux citoyens le minimum indispensable d’un Etat de droit dรฉmocratique, dans un pays en guerre et dont lโexistence mรชme est menacรฉe ?
Entre ceux qui dรฉfendent la permanence du droit pendant cette crise et ceux qui en sont allergiques il y a de la place pour une polรฉmique saine :
โ Au niveau de la gouvernance centrale, le problรจme rรฉcurrent c’est la tendance ร multiplier les communications sur des sujets qui ne figurent pas dans les missions de la transition et qui ne sont pas des prioritรฉs. Sur un autre plan certains acteurs la classe politique ont รฉtรฉ quelque peu surpris par l’extrรชme mรฉfiance du Premier ministre (PM) envers la fameuse ยซ vieille ยป classeย politique, et dans le mรชme temps il adoube son homologue malien, Choguel MAIGA qui est pourtant un vieux routier de la vie politique au Mali, un chef de parti depuis la fin des annรฉes 90, un ancien ministre. Toutefois, reconnaissons-le, le Chef de lExรฉcutif reste fidรจle ร lui-mรชme et la VAR des vidรฉos nous renvoie cette rรฉalitรฉ avec des sรฉquences bien connues.
Cette com du PM pourrait sโavรฉrer contreproductive. Nous lโinvitons avec respect ร prendre davantage de la hauteur pour nโรชtre plus seulement le citoyen engagรฉ, mais pour รชtre davantage le responsable national tant attendu dโun rรฉgime de mission!
โ A travers les rรฉseaux sociaux, de nombreux citoyens exposent divers sujets relevant du domaine de la dรฉfense et de la sรฉcuritรฉ.
Avec les nombreux FAKE News la guerre de la communication fait rage au Burkina sur les rรฉseaux sociaux. Le Burkina ne mรฉrite pas le climat de violence verbale et psychologique entretenu ร travers des messages publics et autres ยซ prรชches ยป organisรฉs rรฉguliรจrement ร ยซ ciel ouvert ยป contre des citoyens, journalistes et hommes politiques. Pire, lโรฉtiquetage facile en ยซ patriotes ยป et ยซ apatrides ยป voire en ennemis du Burkina est dangereux. Il est urgent avoir une rรฉflexion profonde sur lโusage de ces rรฉseaux, afin de tracer les limites possible de ce qui peut รชtre acceptรฉ actuellement.
-Par rapport aux mรฉdias nationaux en gรฉnรฉral, Lโexรฉcutif doit tout faire pour รฉviter le piรจge de lโengrenage ยซ interpellations-sanctions ยป, un risque pour la conduite de la transition.
iv)- Notre pays a une longue tradition de lutte dans la conquรชte et la prรฉservation des droits humains, mais la particularitรฉ du moment rend compliquรฉ un regard critique sur ce thรจme trรจs sensible.
Depuis quelques mois des critiques fusent contre les actions des FDS et des VDP. Ainsi la CEDEAO murmure, lโONU et Amnesty internationale menacent, des mรฉdias franรงais font lโapologie des gourous terroristes. Et pourtant, le terrorisme est quant au fond le summum de la violation des droits humains car les terroristes nโincarne tu plus la race humaine. Malgrรฉ toutes les prรฉcautions, des dรฉrives peuvent avoir lieu, mais elles sont condamnables.
Cโest la raison pour laquelle, les FDS doivent avoir ร lโesprit que des regards inquisiteurs sont portรฉs sur eux, et dรจs lors faire preuve dune extrรชme vigilance sur le terrain des combats ; ย lโautoritรฉ doit mettre en place un systรจme de communication transparent et adaptรฉ, ร lโinstar de la commune de Dori et du MBDHP, afin de ne pas se laisser entrainer dans un ยซ mouta mouta ยป communicationnel trรจs suicidaire. Les intellectuels devraient faire preuve de prudence et de plus dโobjectivitรฉ dans leur communication sur certaines situations et surtout se mettre au service des communautรฉs dont ils sont issus par un travail de conscientisation contre le terrorisme.
Quant aux organisations internationales, elles doivent faire preuve de patience et de discernement afin dโavoir les bonnes informations avant de dรฉcider.ย Dans ce contexte, quoi de plus lรฉgitime que le Burkina mette sรฉvรจrement en garde tout organe de presse qui ยซ va se faire lโรฉcho de lโidรฉologie terroriste ยป !
Souvenons-nous du cas du Prรฉsident GBAGBO, dรฉportรฉ ร la Haye presque dix (10) annรฉes de ยซ captivitรฉ ยป avant dโรชtre acquittรฉ et libรฉrรฉ. Voilร la vie dun grand homme qui a รฉtรฉ ยซ empoisonnรฉe ยป et dรฉtruite en grande partie.
4-La conduite de la transition actuelle pour une gouvernance vertueuse est une tรขche trรจs difficile, car le processus actuel de transition se dรฉroule dans un contexte trรจs particulier, dans un pays en guerre ce qui impose des contraintes fortes. Il faut en tenir compte dans la priorisation des missions de notre transition, surtout que tout est urgent chez nous ! La transition ne peut pas tout faire, mais elle devrait faire tout pour apporter de bonnes rรฉponses ร toutes les questions hautement prioritaires.
A cet effet, nous retenons dans lโordre que la principale mission du moment est de faire face ร la guerre antiterroriste, de lutter contre la corruption, de restituer au Peuple son pouvoir souverain. Dans ce sens, nous apprรฉcions les derniรจres dรฉcisions de la primature avec lโadoption du ยซ Programme dโurgence de la transition : Allier lutte contre le terrorisme et mise en ลuvre des projets prioritaires ยป.
5-La corruption est un vrai cancer de notre sociรฉtรฉ et lโargent semble รชtre le fondamental des fondamentaux dans la vie des citoyens. Au plan politique nous avons tous en mรฉmoire les rรฉsultats de la grande enquรชte du REN-LAC, qui font ressortir un lien trรจs รฉtroit entre la puissance des financements de chaque parti et le nombre dโรฉlus obtenus aux derniรจres รฉlections. Lโargent est de ce fait le premier et unique grand รฉlecteur au Burkina, car plus tu as des feuilles, plus tu as la chance dโavoir des รฉlus.
La lutte contre la corruption est trรจs dรฉcisive en vue d’un assainissement rรฉel de notre administration qui depuis des annรฉes fonctionne sous les ordres des politiques partisanes et qui constitue ce fait un vรฉritable lit des crimes รฉconomiques. Dr Dieudonnรฉ Valรจre SOME avait affirmรฉย en 2011: ยซ Les consรฉquences de certains crimes รฉconomiques sont souvent plus vastes et plus graves que des crimes politiques.
La lutte contre la corruption se rรฉvรจle comme รฉtant un grand pilier de la lutte contre la mal gouvernance ! Alors rendons un hommage mรฉritรฉ ร certaines organisations comme le REN-LAC, le MBDHP et lโASCE-LC. Quant ร la justice, elle doit traquer les coupables avรฉrรฉs, dรจs lors que des preuves irrรฉfutables existent.
Plus proche de notre dรฉfi majeur, le pouvoir de lโargent est tel quโil a rรฉussi ร convaincre et enrรดler nos propres enfants dans les camps terroristes pour tuer leurs propres frรจres et sลurs. Le terrorisme dans sa cruautรฉ actuelle doit nous servir de leรงon et renforcer notre volontรฉ de faire de la lutte anticorruption un levier dรฉcisif dans le combat conte les sources de financements du terrorisme.
6-Lhistoire politique des nations et des peuples nous enseigne que lโassainissement de la vie politique dans chaque pays se fait naturellement et de faรงon irrรฉversible.
Mais il ne sโagit pas dโappliquer, la thรฉorie infantile de la ยซ gรฉnรฉration spontanรฉe ยป. Nous ne croyons pas que lโรขge ou lโanciennetรฉ soit un critรจre pertinent pour exclure dโautoritรฉ une catรฉgorie de personnes de la vie politique nationale.
Ainsi, le renouvellement qualitatif de la classe politique dans notre pays, ร travers lโassainissement de la vie politique nationale, ne se rรฉsume donc pas ร un remplacement des vieux par les jeunes. La tendance officielle chez nous met lโaccent sur la diminution du nombre des partis, ce qui selon nous n’aura que peu dโimpact sur la qualitรฉ du systรจme des partis. Il faut justement revisiter le systรจme des partis de mรชme que le systรจme รฉlectoral, le nombre de partis ne sera quโune rรฉsultante de cette nouvelle politique de rigueur.
Alors il faut rรฉexaminer les conditions de crรฉation des partis et leurs conditions dโexistence, bannir ร jamais lโimpunitรฉ sur les actes rรฉprรฉhensibles commis par les voleurs au col blanc, sโattaquer au mal de lโargent dans les campagnes politiques, rรฉviser la durรฉe et le nombre de mandats des dรฉputรฉs et des maires avec effet rรฉtroactif, combattre la fraude รฉlectorale et la corruption.
7- Le regard de la communautรฉ internationale sur la guerre au Sahel ne rassure pas les peuples de la sous-rรฉgion. Au plan rรฉgional lโ UA et la CEDAO sont des partenaires omniprรฉsents voire omnipotents, mais elles ne semblent pas comprendre les attentes lรฉgitimes de ces peuples.
Toutefois, notre pays doit considรฉrer lโexistence de ces organisations plus comme une contrainte et non un obstacle. Dans cet esprit, il faut รชtre prudent avant de lรขcher certaines dรฉclarations du genre ยซ nous pouvons vivre sans la CEDEAO ยป. Attention au piรจge de lโisolement, soyons simplement fermes sur les questions de souverainetรฉย car la rรฉalitรฉ gรฉopolitique est telle que ยซ vivre sans eux ยป sera une รฉquation difficile ร rรฉsoudre.
Dans cet esprit, la fรฉdรฉration ou le fรฉdรฉralisme reprรฉsente une aspiration lรฉgitime de nos peuples. Mais au regard de lโhistoire des grands combats de nos illustres devanciers panafricanistes, lโapproche actuelle mise en avant par le PM suscite des interrogations.
Aujourd’hui, cette question qui relรจve essentiellement du pouvoir du peuple souverain, ne constitue pas une urgence prioritaire.
Les relations internationales dans leur globalitรฉ sont un levier essentiel oรน peut se jouer lโissue de notre combat libรฉrateur et cโest aussi ร ce niveau que pourrait se dรฉterminer un pan de lโavenir immรฉdiat de notre pays.
Au-delร de la colรจre lรฉgitime de notre jeunesse, nous sommes persuadรฉs que des trois(03) acteurs fortement impliquรฉs dans cette crise, le Sahel reprรฉsente une proie pour les 02 autres ร savoir les forces de la rapacitรฉ dont la volontรฉ est de contrรดler les richesses de la rรฉgion dune part, et dโautre part les groupes armรฉes dont la mission est dโimplanter les valeurs de lโislamisme radical.
Sโagissant de nos liens historiques avec la France, depuis la Gaule esclavagiste des rois de France, la France chauvine et colonialiste de De Gaule, les Prรฉsidences de nos ยซ Amis africains ยป, les rรฉgimes dits de Gauche avec Mitterrand et aujourd’hui le rรฉgime hybride de Macron, tous ont dรฉfendu et dรฉfendent par tous les moyens les intรฉrรชts de la France !
Depuis des siรจcles, nos populations ont tout endurรฉ, lโhumiliation, les violences, lโasservissement, lโexploitation รฉhontรฉe de nos richesses, les complots et assassinats des leaders patriotes. Le fameux sentiment anti-franรงais, cโest en rรฉalitรฉ notre refus de la politique de lโรtat franรงais, car nous ne combattons ni les franรงais ni la France.
Mais quoi quโil advienne il ne faut pas se faire trop dโillusions, la France ne lรขchera rien, mรชme si tout n’est pas facile pour elle face ร la dรฉtermination de ses anciens ยซ sujets indigรจnesยป enfin rรฉvoltรฉs. Dans notre pays l’on est dรฉsormais convaincu que sur le plan militaire notre coopรฉration na jamais effectivement existรฉ et cโest ce qui explique en partie les infiltrations constantes des terroristes sous les radars de l’armรฉe franรงaise depuis des annรฉes.
Le prรฉsident Franรงais sโaccroche ร tout, prend une posture trรจs malicieuse mais trรจs dangereuse pour nos Etats car dans le fond toutes ses idรฉes de rรฉformes sont constamment des piรจges pour nos Etats.
La nรฉbuleuse franรงafrique reste forte et lโingรฉrence de Paris dans le processus de rรฉforme du F CFA en est un exemple cruel. Cependant, il ne sโagira pas uniquement de chasser la France de notre pays pour y installer la Russie ou tout autre pays. Il faut surtout, faire une autre politique autrement, par lโadoption dune nouvelle politique de coopรฉration, basรฉe sur le socle de la souverainetรฉ nationale, un accord cadre : ยซ Dรฉmocratie et Souverainetรฉ ยป ร soumettre ร tout partenaire.
9-La nรฉcessitรฉ ou non de dialoguer avec les terroristes a souvent รฉtรฉ รฉvoquรฉe mais le cas du Burkina est une รฉquation compliquรฉe avec des paradigmes trop variables.
Lโopinion a pu constater depuis quelques temps lโapparition d’un langage nouveau, ร travers certains mรฉdias Franรงais comme RFI, France 24, Libรฉration et le Monde, langage qui change la notion de groupe dโaction terroriste (GAT) en groupe dโaction rebelle (GAR). Il ne sโagit pas dune simple nuance car un rebelle n’est pas forcรฉment un terroriste et notre pays ne fait pas face ร une rรฉbellion, mais au terrorisme djihadiste.
Sachant bien quโune rรฉbellion peut dรฉfendre des causes justes au contraire du terrorisme qui lui-mรชme incarne le mal et lโinjustice, la manลuvre devient assez simple et consiste ร faire passer les terroristes pour des rebelles. Mme Barbara des Nations Unies en รฉtait la principale tรชte pensante chez nous.
Certains acteurs soutiennent que le dรฉveloppement du djihadisme sous des formes ยซ dโinsurrections armรฉes locales ยป peut รชtre mis ร profit pour un dialogue avec les cadres de ces insurrections. Nous avons des doutes car ces cadres locaux sont tenus par le cordon financier des grosses sommes d’argent quโils reรงoivent et ils sont sous le commandement politique, religieux et militaire des chefs de groupes terroristes lesquels seront les vรฉritables patrons des nรฉgociations.
Et quand on sait que leur aspiration profonde cโest la crรฉation du nouvel Etat de Arawak il y a de quoi รชtre prudent, en travaillant dโabord ร flรฉchir nettement lโรฉvolution de la guerre. Cโest une question dโabord politique touchant ร notre souverainetรฉ et elle est secondairement une question diplomatique.
Dรฉjร huit (08) longues annรฉes que notre pays est en guerre ! Des annรฉes de souffrances, de sueurs et de sang mais cโest aussi huit annรฉes de rรฉsistance farouche et de combat de notre peuple. Cette guerre a dรฉjร un grand impact sur notre vie et aussi sur la donne politique nationale marquรฉe par une volontรฉ brutale d’un changement accรฉlรฉrรฉ.
Nous pourrions ne pas รชtre d’accord avec la direction politique de la transition sur une ou des questions prรฉcises, mais nous serons toujours avec elle face aux terroristes.
Que dieu sauve le Burkina Faso et son peuple !
Ouagadougou le 19 Avril 2023
Dr Alain Dominique ZOUBGA
Officier de Lโordre national