Elle se nomme Toussiane Raichatou Ebou Badélé à l’état civil, mais son nom d’artiste est Elue 111. Après une participation remarquable à l’émission Faso Academy de la RTB, en 2017, la jeune artiste-musicienne burkinabè n’a de cesse de prouver qu’elle a toute sa place dans l’univers musical burkinabè. A ce jour, elle a, à son actif, un album de 10 titres sorti en 2022 et plusieurs singles. Dans cet entretien qu’elle nous a accordé le 7 septembre 2025 dans les locaux du journal, elle donne encore rendez-vous à ses fans et aux mélomanes, ce 12 septembre 2025, sur son compte Youtube à 19h, pour la sortie de sa toute dernière chanson. Elle explique également les raisons du choix de son nom de scène, ses rêves et ses projets à court et moyen termes. Bref, tout cela est à lire aujourd’hui 11 septembre, sur votre média actuburkina.net.
Pourquoi avez-vous choisi pour nom d’artiste Elue 111 ?
Elu vient du verbe élire, qui fait référence à élection. Je pense que je suis venue au monde pour aussi apporter ma contribution, donc que Dieu m’a choisie, il m’a élue. Et le « 111 » renvoie au jour de ma date d’élection car je suis née un 1er novembre, donc le 1er du 11e mois. Dans la logique, tout le monde est élu avec un chiffre en fonction de la date de naissance.
Expliquez-nous votre parcours dans la musique. Comment êtes-vous venue dans le monde musical ?
Je chante depuis toute petite, mais c’était à l’église, dans les chorales d’enfants, puis après dans celles des adultes. Mon parcours scolaire m’a amenée à l’internat chez les sœurs où j’y ai fait la 6e jusqu’à la Seconde. J’ai ensuite fait l’établissement catholique Saint Joseph Moukassa à Koudougou, de la 1re à la Tle. Du coup, comme ce sont des établissements religieux, on faisait les messes chaque matin ou chaque jeudi, ce qui a contribué à nourrir ma passion pour le chant. Puis, quand j’ai obtenu mon BAC, je suis venue à Ouaga pour poursuivre mes études à l’université et en même temps, je décide de participer à l’émission Faso Academy de la télévision nationale (RTB). Mon parcours à ce concours s’est terminé en demie finale. Et jusque-là, je n’avais pas pour ambition d’en faire une carrière. Etant donné que j’avais laissé ma famille à Koudougou pour venir poursuivre mes études à l’université, je chantais dans les cabarets les weekends et en tant qu’étudiante, cela me permettait d’avoir quelque chose pour subvenir à certains besoins. C’est à partir de ce moment que je me suis dit que je pouvais poursuivre ma passion et avoir de l’argent, car il faut reconnaitre qu’il y a de l’argent dedans. Et je me suis dit que je pouvais allier ma formation en communication-marketing, et ma passion qu’est la musique. Cette conviction a fini par prendre le dessus car j’avais fini par trouver là où je me plaisais et qui pouvait me faire gagner de l’argent.
Votre participation à Faso Academy c’était en 2017 et une année après, vous avez sorti un single…
En 2017, j’avais composé une chanson avec des étudiants à l’université où j’avais rencontré un arrangeur du nom de Wens. Et comme je n’avais pas pu aller jusqu’en finale à Faso Academy, tous m’encourageaient etm’ont fait comprendre que certes le concours n’avait pas marché mais que j’avais du potentiel et donc qu’on allait faire une chanson ensemble et la proposer à des producteurs. C’est ainsi que ma première chanson a été écrite par Mister Wens que j’ai interprétée. Les étudiants ont beaucoup aimé et à partir de là, j’étais devenue l’artiste du campus.
Et à ce jour, quelle est votre discographie ?
En 2022, j’ai sorti un album intitulé « Visage ».
Pourquoi un tel titre « Visage » ?
En vérité, à un moment donné, je voulais abandonner la musique parce que, finalement, le rêve que je nourrissais au début, ce n’était pas ça et je me demandais si je ne perdais pas mon temps ? Alors, j’avais décidé de faire un album dans lequel j’allais évacuer toutes mes chansons déjà au studio que je n’ai pas pu sortir et raccrocher définitivement. L’excuse que j’avais donnée à mon public était que j’allais partir à Koudougou présenter à ma famille ce que je suis venue faire à Ouaga. C’est pourquoi j’ai donné le titre « Visage » parce que je venais montrer mon visage, à travers mon album, aux populations de Koudougou. J’y ai donc fait le lancement, ainsi qu’un concert au Théâtre populaire de Koudougou qui a été un succès. Mais les résultats ayant été au-delà de mes attentes, j’ai commencé à revoir encore ma décision d’arrêter ou pas parce que finalement j’ai vu qu’en bossant dur et avec les mains qui me soutenaient et Dieu qui facilitait, il fallait continuer et c’est pourquoi je suis toujours là.
Vous êtes une belle femme et il se dit que dans le milieu, nombreuses sont ces femmes artistes dont les carrières n’avancent pas parce que victimes de harcèlement, etc. Avez-vous été victime de cette réalité au point de vous pousser au découragement ?
Tout à l’heure, vous avez dit avoir travaillé avec « des gens de bureau ». Est-ce à dire qu’en plus de la musique, vous menez une autre activité ?
A ma 2e année d’université, j’ai basculé en cours du soir parce que j’avais effectivement besoin d’argent pour continuer ma musique, ce qui fait que je travaillais les journées et je continuais mes cours les soirs. J’ai fait pratiquement deux ans avec une compagnie de téléphonie mobile. Après le concert à Koudougou, j’étais dans le département commercial d’une structure de la place parce que comme je le dis, j’étais en train de vouloir me retirer, et donc j’ai un peu vu comment les choses fonctionnaient.
On vous voit aussi très engagée dans le social ? qu’est-ce qui justifie cela ?
En réalité, je viens d’une famille qui n’est pas forcement riche mais qui donne beaucoup. J’ai été éduquée ainsi. Je me souviens que quand j’étais petite, ma maman apportait nos vieux habits au village, et quand j’y partais, je voyais des enfants les porter, je n’étais pas du tout d’accord mais au fil des ans, j’ai compris le bien-fondé. On m’a inculquée ces valeurs d’entraide, de solidarité et de partage. Mon père est un commerçant et chaque jour, à son lieu de service, des nécessiteux viennent à des heures précises pour prendre leurs rations journalières. A force de voir mon père et ma mère poser ces actes au quotidien, et le fait d’avoir fréquenté des écoles catholiques, ont forgé cet esprit en moi. Aussi, je me suis dit qu’en tant qu’artiste, porteuse de voix et leader d’opinions, il serait bien de véhiculer de telles valeurs. Aussi, quelqu’un qui est un élu de Dieu n’est pas quelqu’un de banal. Je suis consciente de cette responsabilité. Par ailleurs, bien des gens qui ne sont pas forcément ici, me suivent, et c’est aussi ma façon de donner ce que je reçois. En tant qu’artiste, des gens paient mes tickets pour mes activités, postent mes vidéos, etc, donc, c’est une façon pour moi d’être redevable de temps en temps envers les autres. Mais j’avoue que je tire beaucoup de plaisir à le faire parce que c’est sur fonds propres que je réalise ces activités. En la matière, j’ai même créé une association dénommée « les Elus en action » et on accompagne les activités allant dans le social.
Quels sont les thèmes que vous abordez dans vos chansons ?
La plupart du temps, je parle d’amour. Je pense que beaucoup de mes titres parlent plus d’amour. Mais il y a aussi la foi en Dieu, le pardon. Généralement, tout tourne autour de l’amour, entre un homme et une femme, de déception amoureuse, de déclaration d’amour.
Pourquoi n’avez-vous pas évolué dans un registre religieux, du genre Gospel, vu que vous avez baigné dans ce registre et que vous êtes attachée à la foi, à la religion ?
Pourquoi pas ? Mais en tant que quelqu’un qui a fait le marketing, je me suis dit que le schéma pour commercialiser le Gospel, ici, n’est pas très rentable. Pour moi, pour mieux vivre de mon art, il fallait vendre ce que les gens vont consommer. Il n’y a pas encore de bonne formule en la matière. Je suis catholique et chez nous, le Gospel n’est pas trop développé. Peut-être que si j’étais d’une autre confession religieuse, ce serait encore mieux. Aussi, je ne voulais pas rester seulement dans le milieu religieux, mais on ne sait jamais.
Quels sont les projets de l’Elue 111 à court et moyen termes ?
J’étais en production, il y a trois à quatre mois de cela. Je suis en train de me reprendre en autoproduction. A court terme, il y a que je sors une chanson la semaine prochaine, précisément le 12 septembre, parce que la dernière date d’il y a onze mois. Je donne donc rendez-vous ce 12 septembre sur Youtube à partir de 19h, pour dévoiler mon nouveau bébé. C’est l’occasion pour moi de dire merci à tout le monde pour le soutien, surtout concernant la chanson « Pag la yiri », qui m’a permis de tenir jusque-là. Ce vendredi (NDLR : demain 12 septembre), je vais dévoiler une autre chanson. Aussi, j’envisage de faire un concert le 1er novembre, jour de mon anniversaire. Je parle de cela parce qu’étant encore indépendante, peut-être qu’il y a des bonnes volontés qui voudront accompagner. Ce sera une œuvre sociale car j’ai à cœur de faire un concert-live pour les Forces de défense et de sécurité (FDS), à la Place de la nation de Ouagadougou, et je nourris le rêve de les voir nombreuses ce jour-là. Peut-être que des collègues m’accompagneront. On a commencé les démarches, on a déjà eu l’accord de la mairie ; la procédure est en cours à l’Etat-major des armées. On est dans le processus de demande de soutien et je pense que je vais y arriver. Je vous donne déjà rendez-vous à la Place de la nation pour un grand concert, le 1er novembre. Après cela, en 2026, je prévois d’organiser un concert payant, ici à Ouagadougou, parce que j’ai fait un concert à Koudougou, en 2022, mais je ne l’ai pas encore fait ici.
Qu’en est-il de l’international ?
Déjà, j’étais à la Nuit du Faso Danfani à Paris en juin dernier. Il est vrai qu’il y a des dates prévues pour certains évènements, mais qui ne sont pas encore bien précises étant donné que ce sont des histoires de voyage. Mais j’espère que Dieu fera ce qui est bon pour moi.
Un message à l’endroit de vos fans, ceux qui aiment ce que vous faites
Propos retranscrits par Thérèse OUEDRAOGO (Stagiaire)