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PRESSE LIBRE ET INDEPENDANTE : La mauvaise conscience des dictateurs

A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, Reporters sans frontières a fait un constat sans appel. L’état de la liberté de la presse dans le monde n’est guerre reluisant. Ce constat, qui se fonde sur des faits, doit interpeller tous ceux qui, au-delà du monde des journalistes, luttent pour la promotion de la liberté de l’information. Car l’enjeu ici est la défense de la liberté tout court. Et rien ne doit empêcher les journalistes dignes de ce nom d’y contribuer. Ni l’atteinte à leur intégrité physique ni le risque d’être jetés en prison pour la liberté dont ils font preuve dans le traitement de l’information, ne doivent les amener à capituler face à leur devoir sacré d’exercer leur métier selon les règles de l’art.

Des dirigeants du Gondwana sont conscients qu’ils ont tout à craindre d’une presse véritablement libre et indépendante

En France, Charlie Hebdo est en train de nous montrer la voie, la bonne. Celle qui consiste à ne pas faire le jeu des adeptes de l’intolérance, en mettant la clé sous le paillasson suite à l’attentat terroriste meurtrier qui l’avait douloureusement éprouvé, on se rappelle, le 7 janvier dernier. Si Charlie Hebdo avait plié l’échine face aux terroristes en baissant définitivement pavillon, cela aurait consacré le retour de la France, pays des droits de l’Homme, à « l’âge d’or » du Moyen Age où la moindre critique en direction des dieux conduisait systématiquement leurs auteurs au bûcher. En continuant de paraître sans altérer la philosophie qui est la sienne depuis toujours, Charlie Hebdo montre à la face du monde qu’aucun sacrifice n’est de trop lorsqu’il s’agit de défendre la liberté de la presse. Car de cette liberté, peut-on dire, dépendent les autres libertés. C’est pour cette raison d’ailleurs que dans bien des pays d’Afrique, les dirigeants ne veulent pas en entendre parler. Dans leur volonté affichée, en effet, de torpiller la démocratie afin de mieux défendre leurs intérêts et ceux de leur clan, des dirigeants du Gondwana sont conscients qu’ils ont tout à craindre d’une presse véritablement libre et indépendante. Et ils se donnent les moyens pour briser les plumes les plus hardies et pour faire taire à jamais les voix discordantes qui les empêchent de sévir en rond, comme ils veulent et quand ils le désirent, contre leur peuple. En Erythrée, en RDC et au Burundi, pour ne citer que ces pays-là, la presse libre et indépendante est considérée comme l’ennemi public numéro 1. Il faut donc l’abattre sans autre forme de procès et sans état d’âme. C’est ce que Pierre Nkurunziza, le président burundais, vient de faire dans son pays en fermant systématiquement toutes les radios privées indépendantes qui se sont positionnées ouvertement contre ses dérives antidémocratiques. Car, la presse libre et indépendante représente, de toute évidence, pour les dictateurs de tous pays, leur mauvaise conscience. A cette race de prédateurs primaires de la démocratie, qui n’ont pas besoin de porter de gants pour livrer bataille à la liberté de l’information, l’on peut ajouter une autre catégorie de pays qui, comme le Tchad, ne tolèrent la presse libre et indépendante qu’en théorie. Dans la pratique, ils portent en horreur tous les médias qui, dans leur traitement de l’information, formulent des critiques contre la gouvernance des dirigeants.

La présence d’une presse libre et indépendante permet d’éviter bien des dérives

Mais il est heureux de constater que contrairement à ces pays où la démocratie et la presse privée et indépendante sont méthodiquement malmenées, il existe quelques îlots en Afrique où la liberté de l’information est une réalité. Au nombre de ces pays, il y a le Sénégal, le Niger et le Burkina. Dans les deux premiers cités, la dépénalisation des délits de presse a été adoptée. Au Burkina, elle est en voie de l’être. Il faut, par conséquent, rendre hommage aux dirigeants de ces pays. Car ils ont décidé, de ce fait, de tirer dans leur pays, la démocratie vers le haut. Ce faisant, ils rendent non seulement service à leurs compatriotes, mais aussi à eux-mêmes. En effet, la présence d’une presse libre et indépendante dans un pays permet à ses dirigeants, pour
peu qu’ils soient responsables, d’éviter bien des dérives. C’est pourquoi le combat pour la liberté de l’information doit être porté non pas par les seuls journalistes mais par l’ensemble de tous les chevaliers de la démocratie et du développement. Car à chaque fois qu’un journaliste est assassiné dans l’exercice de son métier, c’est l’horizon de la démocratie et de la tolérance qui s’éloigne . De ce point de vue, le monde n’a pas le droit d’oublier les journalistes qui sont déjà tombés sur le champ d’honneur comme Norbert Zongo, Claude Verlon et Ghislaine Dupont et de bien d’autres dont nous oublions les noms. A chaque commémoration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, leur mémoire doit être célébrée pour rappeler qu’ils ne sont pas morts pour rien. Dans la même veine, toutes les associations de défense des journalistes, de même que tous ceux qui savent que sans la liberté et l’indépendance de la presse, le monde qui est déjà violent, se transformerait en un véritable Etat de nature, doivent, en synergie, s’investir pour que tous les pays aillent dans le sens de la dépénalisation des délits de presse. En attendant cela, l’on peut déjà se poser la question de savoir ce qu’est devenue l’idée portée par certaines associations de journalistes et qui avait germé suite à l’assassinat de Claude Verlon et de Ghislaine Dupont, selon laquelle le fait de tuer un journaliste doit être perçu comme un crime contre l’humanité. Le monde entier gagnerait à ce que cette idée se matérialise sous forme de traité que chaque pays sera tenu d’observer scrupuleusement.

« Le Pays »

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