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Dr Patrice Kouraogo, enseignant-chercheur : « l’éducation moaga est très rigoureuse, ce n’est pas de la féodalité »

« L’éducation dans le Mogho, un terreau fertile de promotion du patriotisme, du civisme, des valeurs coutumières et traditionnelles » était au cœur de la conférence publique animée ce 15 mai 2025, au Palais royal de Panghin, dans le cadre de la célébration de la 2e édition de la Journée des coutumes et des traditions. Ce thème subdivisé en des sous-thèmes, a été décortiqué par des professeurs, des enseignants chercheurs et autorités coutumières.

« Les savoirs faire endogènes éducatifs et culturels des Mossés ». Tel a été un des sous-thèmes du thème central développé par Dr Patrice Kouraogo, maitre de recherche au CNRST, un des communicateurs. Selon Dr Kouraogo, sa communication issue d’un travail de terrain réalisé dans 4 régions du Burkina, a été l’occasion d’interroger les Mossés sur les savoir-faire en matière d’éducation et  de culture. Il en ressort, selon le conférencier, 8 axes. « Par exemple, le premier parle de savoir craindre la honte. Chez les Mossé, cela est extrêmement important. On éduque l’enfant, depuis le ventre de sa mère jusqu’à sa tombe, pour qu’il sache qu’il doit craindre la honte.  Pourquoi ? parce que quelqu’un qui pose des actes honteux salit non seulement son nom, le nom de sa famille  et de ses parents.  Le 2e axe c’est le savoir parler mooré. A l’intérieur, nous allons voir beaucoup de choses : les chansons, les devises, les noms de familles et même les prénoms. Quand on prend le prénom Saaga, Tinga, de plus en plus, les gens les délaissent alors qu’ils font partie de nous. Le 3e axe, c’est le savoir se défendre et se protéger. On apprend à un jeune moaga à se protéger. Cela va commencer par aller consulter, chercher des médicaments pour soigner sa famille, ça va aller jusqu’à l’art de faire la guerre… C’est donc un ensemble de 8 catégories de savoir-faire éducatifs et culturels que nous allons développer à travers cette thématique », a expliqué le communicateur. A la question d’un journaliste de savoir ce que répond l’enseignant chercheur à ceux qui estiment que le moaga est un féodal, le conférencier dit ne pas être de cet avis, mais reconnait que l’éducation moaga est rigoureuse.

Les panélistes lors de la conférence publique

 

« Dire que le moaga est féodal, c’est trop dire mais on peut dire qu’il est rigoureux, parce que c’est différent.   Comme on l’a dit, aussi bien le jeune, la femme, l’adulte et jusqu’à la vieille personne, le moaga continue de l’éduquer. Pourquoi ? Parce qu’on ne veut pas faillir. Très tôt, les Mossé ont compris que si on rate la base de l’éducation, ce que l’on souhaite dans la société, la cohésion, l’entente, la solidarité, l’entraide, on ne peut l’avoir. Comme je le dis dans ma communication, être solidaire, ne s’improvise pas. Il faut qu’on vous éduque dès le bas âge à cela. Dans le quartier, respecter un vieux, l’aider à dresser sa case, ça vient de votre éducation. Donc c’est la rigueur. Honnêtement, l’éducation moaga est très rigoureuse, ce n’est pas de la féodalité », a-t-il soutenu.

 

« Si vous vous croisez sur facebook et que la famille n’est pas au courant, vous aller divorcer sur whatsapp »

 

A son avis,  tout bon père doit être rigoureux parce que le seul bien à donner à un enfant, c’est l’éducation. « Si l’éducation a failli, c’est dire que l’intéressé a raté toute sa vie. Même le savoir se marier chez les Mossé n’est pas donné à n’importe qui…Lorsque que vous dites que vous allez vous marier dans la société traditionnelle, lorsque la femme arrive aujourd’hui mais pour qu’elle vive dans la case de son mari, il faut 21 jours. C’est déjà pour vérifier voir si elle n’est pas venue avec une grossesse. Cela pour vous dire que la femme là n’est pas la vôtre, c’est pour le « Boudou ».  Et tu ne peux pas te lever du jour au lendemain pour la chasser. Quand je suis avec mes étudiants, je caricature cela en leur disant que si vous vous croisez sur facebook et que la famille n’est pas au courant, vous aller divorcer sur whatsapp », a-t-il laissé entendre.

 

Gouvernance coutumière et gouvernance actuelle du foncier

La question du foncier, notamment la gestion coutumière du foncier face à la gouvernance foncière actuelle, a été un des sous-thèmes abordés par le Nêm Naaba. Dans sa communication, le Nêm Naaba a présenté la manière dont le foncier était géré par les ancêtres, puis par les grands-parents, les mécanismes qu’ils utilisaient face aux conflits et les moyens utilisés actuellement.

 

Le Nêm Naaba a décortiqué le gouvernance coutumière et actuelle du foncier

 

Et de se demander s’il n’y a pas lieu de prendre en compte les mécanismes anciens qui mettaient en exergue la médiation et la conciliation.  « Pourquoi ne pas prendre en compte ces aspects culturels qui constituent les fondements de notre société dans les lois modernes ? », interroge-t-il avant d’indiquer que des recommandations ont été formulées pour que cessent les bradages des terres par les chefs coutumiers et traditionnels. « Il est d’ailleurs prévu dans la loi, la possibilité de louer la terre sur des années. Cela peut être une solution pour que les gens ne bradent pas les terres parce que ceux qui nous ont légué ces terres pouvaient les vendre à leur temps mais ils ne l’ont pas fait. C’est une chance pour nous d’avoir hérité de ces terres et c’est à notre tour de les léguer à nos enfants et petits-enfants », a estimé le Nêm Naaba.

Colette DRABO

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